Il y a urgence à lire le Tao de Lao-tseu
au milieu du chaos actuel de ce monde.
Mais l’entreprise n’est pas si facile,
comme en témoigne la première phrase du Tao tô king
le célèbre ouvrage du grand maître taoïste.
Le Tao qui peut être exprimé
n’est pas le Tao éternel.
A elle seule, son énigme pourrait donner lieu à tout un article,
en interpelant les bases de la culture occidentale ;
mais je n’emprunterai pas ce chemin,
mieux vaut le détour…
Du réveil à l’éveil matinal
Le meilleur détour commence par le réveil matinal,
c’est le moment le plus important de la journée
il ne faut pas le rater :
émerger lentement de l’espace mystérieux de la nuit,
atterrir en douceur du voyage cosmique,
rester quelques temps les yeux fermés
pour laisser s’en aller les dernières bribes du rêve ;
ressentir son corps de l’intérieur avec toutes les énergie du moment,
choisir de renaître encore une fois, comme au premier jour,
comme s’il s’agissait d’une nouvelle vie ;
puis se lever lentement pour la journée à venir,
commencer par la purification de l’eau
la laisser couler sur son corps telle une rivière de fraîcheur
pour nettoyer et activer la circulation intérieure ;
puis, procéder à quelques mouvements respiratoires profonds,
à quelques gestes issus des ancestrales traditions
– yoga, qi gong, tai chi, etc ;
ouvrir l’espace de la méditation :
se retrouver dans la vastitude intérieure,
se sentir relié au tout,
dissoudre ou évaporer lentement le moi
toujours crispé en ses désirs sans fin ;
terminer par la lecture d’un texte inspirant,
comme une imprégnation conductrice du mental,
qui vous guiderait toute la journée vers les hauteurs :
alors, il y a une place privilégiée pour Lao tseu,
le grand maître taoïste,
avec son unique ouvrage, le Tao-tö king ;
lire et relire sans cesse ces mots souvent énigmatiques,
à chaque fois ressentir la grande détente de l’Esprit,
ou une fulgurance de lumière
venant inonder l’aube,
approcher l’éveil à pas de velours.
.
La légende de Lao-tseu
Tous les grands hommes qu’ils soient génies, maîtres ou sages
ont une légende,
elle tourne autour de leur souvenir comme une aura de lumière,
car ils ne peuvent se satisfaire de la sécheresse d’une ‘histoire factuelle.
Pour Lao-tseu la légende est omniprésente,
d’autant plus que l’on ne sait pas grand chose de sa vie :
il serait né au VIe siècle av JC, la grande période axiale de l’humanité – comme le nomme Karl Jaspers –
car une constellation de maîtres de sagesse choisirent ce moment pour éveiller la conscience des hommes :
Bouddha, Mahavira, Héraclite, Socrate, Zoroastre, Confucius….
Lao-tseu ne pouvait avoir été conçu par une banale relation sexuelle :
la mère de Lao-tseu après avoir absorbé une prune magique, aperçut une comète dans le ciel annonçant la naissance de son enfant prodige.
Lao-tseu naît avec les cheveux et la barbe blanche, d’où son nom Lao tseu, « l’enfant vieux » ou « le Vieux » dans le sens de vénérable.
Il aurait vécu au moins 200 ans – c’est un minimum à cette époque pour ceux qui s’adonnaient aux pratiques intérieures visant à l’immortalité physique et spirituelle.
On rapporte qu’il était astrologue, archiviste, bibliothécaire à la cour de l’empereur Zhou, ce qui est une activité de choix pour accéder aux textes sacrés et magiques de l’époque.
Il aurait rencontré Confucius pour une mythique controverse sur la manière d’éduquer l’homme, entre non-agir et apprentissage volontariste.
Las des intrigues et des querelles politiques, écoeuré de l’atmosphère décadente de l’époque,
il s’éclipsa un jour de la cour et disparut mystérieusement.
On raconte qu’il partit vers l’Ouest juché sur un buffle, et qu’il fut reconnu par le gardien d’une passe à la frontière du royaume.
Celui-ci ne l’autorise à poursuivre son chemin que s’il lui écrit le résumé de sa pensée .
Ce fut le Tao tö king : « le livre canonique de la Voie et de la Vertu » en 81 aphorismes, parce que le nombre 9 et ses composés sont des nombres magiques pour le taoïsme.
Puis Lao-tseu s’en alla vers la montagne,
on n’entendit plus jamais parler de Lui ;
La légende raconte qu’il poursuivit son chemin vers l’Ouest, jusqu’en Inde pour enseigner au Bouddha,
ce qui ne serait pas complétement étonnant vues certaines similitudes de l’enseignement,
– entre le Tao et la vacuité lumineuse , état ultime de la méditation, il y a un lien de continuité.
Quelques aphorismes
Une des difficultés premières, est de choisir une traduction du Tao tö king,
parmi les dizaines présentes sur le marché, toutes plus différentes les unes que les autres.
Pour ma part je préfère celle de Stephen Mitchell aux Synchronique éditions,
elle est accompagnée de superbes idéogrammes calligraphiés,
et me semble la traduction la plus libre et la plus inspirée :
comme un poème sur le Poème :
ce sont mes quatorze années de pratique du zen qui ont constitué l’essentiel de ma préparation à ce travail et qui m’ont mis face à face avec Lao-tseu et ses véritables disciples et héritiers, les premiers maîtres zen.
J’ai mis parfois entre parenthèse une autre traduction, celle de Liou Kia-hway qui me semble intéressante, plus près du texte chinois originel.
J’aime aussi le CD paru dans la collection « écoutez / lire » chez Gallimard, lu par la belle voix de Didier Sandre.
1
Le Tao qui peut être exprimé
n’est plus le Tao éternel.
Le nom qui peut être nommé
n’est plus le Nom éternel.L’indicible est l’éternellement réel,
nommer est l’origine
de toutes choses particulières.
(Sans nom il représente l’Etre éternel,
avec un nom, la Mère des dix mille êtres);Libre du désir, tu comprends le mystère.
Pris dans le désir, tu ne vois que
les manifestations.Pourtant mystère et manifestations
jaillissent de la même source.
cette source s’appelle ténèbres.Ténèbres dans les ténèbres.
La porte vers toute compréhension.
(Obscurcir cette obscurité,
voilà la porte de toute merveille).32
Le Tao ne peut être perçu.
Plus petit qu’un électron,
il contient d’innombrables galaxies.Si les puissants et les puissantes
pouvaient rester centrés dans le Tao,
toutes choses seraient en harmonie.
Le monde deviendrait un paradis.
Les gens seraient en paix
et la loi serait inscrite dans les coeurs.Quand aux noms et aux formes
sache qu’ils sont provisoires.
Quant aux institutions,
sache reconnaître où leur rôle doit finir.
Sachant quand t’arrêter,
tu peux éviter n’importe quel danger.Toutes choses finissent dans le Tao,
comme les rivières se jettent dans la mer.42
Le Tao donne naissance à l’Un.
L’Un donne naissance au Deux.
Le Deux donne naissance au Trois.
le Trois donne naissance à toute chose.Toutes choses sont adossées au féminin
et font face au masculin.
Quand masculin et féminin se rejoignent,
toutes choses s’harmonisent.Les hommes ordinaires détestent la solitude.
Mais le Maître s’en sert,
l’embrassant, comprenant
qu’il est un avec l’univers.48 (cette strophe peut résumer la controverse entre Lao-tseu et Confucius.)
Dans la recherche du savoir,
chaque jour quelque chose est ajouté.
Dans la pratique du Tao,
chaque jour quelque chose est lâché.De moins en moins tu as besoin de forcer les choses,
jusqu’à ce que finalement tu parviennes à la non-action.
quand rien n’est fait,
rien n’est inachevé.La vraie maîtrise peut être gagnée
en laissant les choses suivre leur cours.
elle ne peut être gagné en interférant.
(C’est par le non-faire que l’on gagne l’univers.
Celui qui veut faire ne peut le gagner.)81
Les paroles vraies ne sont pas éloquentes (agréables).
Les paroles éloquentes ne sont pas vraies.
Les hommes sages n’ont pas besoin de prouver leurs dires ;
les hommes qui ont besoin de prouver leurs dires
ne sont pas sages.Le Maître ne possède rien.
Plus il fait pour les autres,
plus il est heureux.
Plus il donne aux autres,
plus il est riche.Le Tao nourrit en ne forçant pas.
En ne dominant pas, le Maître dirige.
Commentaires
Le Tao tô king est composé de 81 chapitres,
il vaut mieux les appeler « aphorismes »
ou mieux encore : « poèmes »,
car Lao tseu manie la poésie telle que je l’aime,
une poésie reliée au mystère du monde et de son origine,
éclairant parfois de sa limpidité fulgurante
les ténèbres de l’ignorance humaine.
Lire ce livre lentement, à petites doses,
comme l’on sirote une alcool précieuse,
dont la teneur vous chavire parfois l’Esprit.
Ne rien comprendre souvent,
mais être bien dans cette obscurité première,
comme le serait un poisson de retour dans son eau.
Laisser la lumière jouer avec l’obscur
et faire son chemin
à son insu
dans l’espace offert de la conscience.
Est-il besoin en fin de compte de faire des commentaires ?
« Le Tao commenté n’est-il déjà plus le Tao ? »
si j’ai bien compris la leçon du Maître,
lui qui n’a écrit que sous la contrainte,
lui qui doutait tant du pouvoir des mots.
Il y a dans ce dédain des mots et du savoir inaptes au Tao,
quelque chose de scandaleux qui pourrait faire vaciller tout le logos de la culture occidentale.
Seuls peut-être Héraclite ou Nietzsche ne s’en offusqueraient pas,
eux qui semblent souvent plus près de la poésie que de la philosophie.
Oser lire le Tao,
c’est prendre le risque de se mettre en confusion mentale,
prêt à renoncer à toutes les certitudes du savoir, des pensées et de ses croyances,
tout ce sérieux qui voudrait vous convaincre à tout prix de sa vérité partielle,
tous ces dogmes rigides toujours prêts à faire la guerre si vous leur résistez.
Ne vous avisez pas de rire de manière taoïste
face à un savant vous expliquant son étude scientifique, randomisée en double aveugle !
Face à toutes ces empoignades religieuses,
dont malheureusement nous voyons actuellement le sinistre retour,
il y a Lao-tseu, « le Vieux », Il ne dit pas grand chose.
Il préfère quitter la cour de l’empereur en catamini et disparaître dans les montagnes,
laissant derrière lui une poignée d’aphorismes,
pour une grande détente de l’espace spirituel,
le sourire de l’Esprit au dessus de la dualité.
Car au delà de toutes les croyances, de tous les dogmes, de tous les rituels,
règne le Tao éternel ;
mais ce n’est pas un règne séparé des innombrables formes de notre incarnation terrestre,
il n’est pas inatteignable, perdu au loin dans un arrière monde,
au contraire, il est là, partout, dans le souffle tendre de sa présence invisible,
incluant toutes choses en les transcendant,
tel le principe intégratif poussé en son ultime conséquence.
Qu’il est tentant alors d’invoquer « la pleine conscience »,
pour vivre et expérimenter de l’intérieur le Tao.
Pas étonnant que Lao-tseu soit parti enseigner au Bouddha,
que ce soit physiquement ou par transmission de pensée dans « un nuage morphique à la Scheldrake ».
La méditation du Bouddha est l’outil de prédilection pour rencontrer le Tao :
décider un jour, devant le chaos du monde,
de s’assoir quelque part, immobile, dans le silence intérieur, pour observer son souffle,
et recevoir l’offrande du Tao en sa pleine conscience.
Commencer par le non-agir de la méditation,
puis peu à peu s’entraîner à agir dans le non-agir,
de sorte que le Tao soit toujours là pour guider ses pas.
Brume ce matin sur Paris.
Je pense au « Vieux », je pense à Lao-tseu :
me vient l’irrésistible évidence
de sa disparition un jour dans la brume,
pour s’en aller vers la montagne,
en chevauchant le buffle.
Il a choisi la brume pour mieux effacer sa trace,
la brume pour s’enfoncer dans l’origine indifférenciée des choses,
pour têter le lait brumeux de la Mère originelle,
où règne l’éternelle paix intérieure.
Voir aussi la page consacrée à Lao-tseu sur mon site « psychotherapie-integrative » dans la partie consacrée à « l’esprit intégratif »
Tags : bouddhisme, livres, maitres, sagesse, spiritualité, taoïsme, traditions
Quel très bel article ! Le taoïsme fait partie intégrante de ma vie, même si je suis débutante.
C’est surtout au niveau du non jugement, de la non action, que la sagesse y règne. On le comprend toujours mal quand on est un occidental secoué par la vie moderne, mais on peut s’en imprégner quelque peu au fil du temps en s’y laissant aller, en lâchant prise comme on dit…
Ce ne sont pas des paroles vaines…
Comme on a du mal à se les rappeler, à se les « vivre », happés dans nos petits problèmes de civilisés ! Toujour il faut y revenir pour trouver la paix du vieux Lao.
Ce n’est pas ridicule et c’est fondamentalement joyeux.
Merci encore.
Vous dites Anny : « Ce ne sont pas des paroles vaines…Comme on a du mal à se les rappeler, à se les « vivre », Je suis d’accord. La question, c’est pourquoi, nous avons tendance à les oublier ces paroles ?
Je crois que c’est à cause de notre nature multidimensionnelle, avec la balance qui a tendance à pencher malheureusement du côté de nos dimensions archaïques, pulsionnelles, inconscientes, mécaniques, etc. je crois que dans un premier temps (ou simultanément), il est important de conscientiser ces dimensions (lectures, informations et travail sur soi-même de nature psychothérapeutique). Par exemple, en ce moment, il faut lire tout ce qui sort relativement aux découvertes des neurosciences. Mais en même temps, il faut lire et surtout pratiquer Lao-tseu – et les autres – qui s’adressent à notre plus haute dimension d’ordre spirituel, métaphysique ou religieuse (au sens de religiosité). Pratiquer pour moi, c’est d’abord la méditation, c’est à dire s’immobiliser dans le silence et contempler le moment présent en observant son souffle.
Comme lui je suis justement en train de disparaitre.
Adieu
oui, j’entends Nicole, mais la question c’est comment et quand disparaître. Quand Lao-tseu a disparu, il n’a jamais été aussi présent, comme s’il avait accumulé le pouvoir et la force (il est juché sur un buffle) de se répandre partout au delà de l’espace temps.
Rupert Sheldrake explique cela très bien par la création d’un champ morphique, en l’occurrence pour Lao-tseu la création d’un sublime champ morphique qui résonne encore pour nous de toute sa force et vient nous visiter parfois au coeur de nos grandes villes chaotiques.
Comme tout cela raisonne juste !
Merci Alain de nous le remettre en mémoire,
Hélène
Je vous suggère cette page: http://www.syti.net/StanGrov.html
Merci Hélène pour cette belle parabole que j’ignorais, de Stanislav Grof,
Mais il me semble que le flocon de neige finit toujours par fondre naturellement, et donc, transformé en eau, rejoindre par des voies détournées l’Océan.
Un grand Merci
Jean-François Billeter traduisait le Mot Tao par « fonctionnement des choses ». Je trouve que cette traduction entoure merveilleusement bien les différents sens du mot Tao et les traduit bien, par « un groupe de mots ».
Lao-tseu ne serait-il pas aussi dans une démarche d’approfondissement ?. Dans son petit petit traité sur l’errance, l’auteur Japonnais Akira Mizubayashi explique sa propre démarche, par un retrait, sans attachement aux choses, sans maître, sans doctrine, sans direction , se sentant totalement en marge de la communauté dont il fait partie, afin de pouvoir survivre, de résister à l’idéologie directrice en attendant de pouvoir un jour recréer, une communauté (société) où chacun aurait vraiment sa place. N’avons-nous pas tous besoin de retrait ? N’est-ce pas pour revenir ?
La méditation est à mon avis la ré-appropriation d’une posture perdue, d’une attitude pour faire face dignement à ce qui nous arrive. Certains y trouvent la paix. Mais si on la cherche, attention au matérialisme spirituel comme dirait Trungpa. Ce n’est qu’un point de passage, afin d’être mieux au monde et dans le monde, parmi les êtres sensibles.
Les moines zen choisissent facilement la nature comme territoire. Ryokan est retourné vers les siens à la fin de sa vie ! Le bouddha a enseigné durant 45 ans de sa vie aux hommes. N’en avait-il pas besoin ? Cela n’enlèverait pas un millimètre à son mérite ?
Quel beau commentaire, François, très inspirant.
je vais me procurer le « Petit éloge de l’errance » de Akira Mizubayashi. J’entendais aussi récemment l’interview de Lena Mauger sur son livre « Les évaporés du Japoné, où elle parle de ces centaines de milliers de japonais qui disparaissent chaque année à la périphérie des grandes villes pour mener une existence de disparus – comme si Lao-tseu d’une certaine manière avait encore fait des émules, la tradition zen enfonçant un peu plus le clou.
Cela m’incite à réfléchir à cette notion de « retrait » si fascinante : retrait du monde, retrait de soi-même, ou comme vous dites si bien « la ré-appropriation d’une posture perdue, d’une attitude pour faire face dignement à ce qui nous arrive. »
je crois que ce retrait est d’abord et avant tout un retrait intérieur, peu importe si l’on choisit un retrait physique ou social – une certaine marginalité – ou si l’on reste immergé dans la grande ville pour méditer sur la place du marché.
Idem pour la posture d’enseignant du Bouddha, complétement engagé finalement socialement dans son époque, même s’il prône par ailleurs la voie monastique.
Personnellement je me sens au mieux sur la place du marché, au coeur de la grande ville. Même si mon retrait est presque total à l’intérieur, et que je ne partage en rien le chaos ambiant, il me fascine.
C’est vrai que le Bouddha a prôné la voie monastique , mais il répondait aussi à quiconque s’adressait à lui. Avec bienveillance et clarté il expliquait la voie, et adaptait le Dharma à la personne qui lui faisait face. C’est, je pense, au niveau superficiel qu’il peut nous apparaître certaines contradictions dans ses dires, mais plus profondément les choses se passent différemment.
Chacun a besoin de comprendre les choses à son niveau: pour un paysan, un philosophe ou un artiste la liberté par exemple, ne prend pas le même visage. Mais elle reste pour tous la liberté quand même.
Quand vous parlez de retrait total et à l’intérieur, j’ai de la peine à comprendre cette position. Vous sentez-vous seul à ce moment?
Pour ma part, l’attention peut-être porté soit à l’extérieur de soi ( au monde qui m’entoure) soit à l’intérieur de soi ( mon corps). Ce que je fais régulièrement, j’alterne de l’un à l’autre, souvent très rapidement, sans m’en rendre compte.
Ce retrait voudrait-il dire peut-être que vous portez votre attention sur l’intérieur de votre corps, bien qu’étant au milieu d’une foule ? Mais pour vous diriger, vous avez besoin aussi de vous soucier de ce qui vous entoure ? Pourquoi ne pas partager aussi avec le chaos ambiant ?
J’ai remarqué chez moi que la fascination avait tendance à me rendre stupéfait, presque muet quand elle m’accapare. Je me demande si elle ne me fait pas un peu peur en même temps que me fasciner ?
oui François, vous dites :
« Pour ma part, l’attention peut-être porté soit à l’extérieur de soi ( au monde qui m’entoure) soit à l’intérieur de soi ( mon corps). Ce que je fais régulièrement, j’alterne de l’un à l’autre, souvent très rapidement, sans m’en rendre compte. »
Je crois que vous avez raison : cette alternance ou plutôt pour moi cette intégration simultanée de monde extérieur et du monde intérieur lors de la méditation est la marque d’une avancée dans la pratique. Je suis d’accord pour dire que la méditation sur la place du marché en plein chaos extérieur est un exercice important pour les grands méditants, déjà bien exercés à la méditation.
Par contre, je pense que l’entraînement quotidien et l’apprentissage de la méditation est plus facile, mais surtout plus évolutif au début, dans une position de retrait du monde extérieur, soit seul soit dans un lieu dédié à la méditation collective. En effet, le plus difficile, c’est de s’entraîner à développer la conscience interne ou intérieure, car cela va à contre courant du conditionnement sociétal premier, qui consiste à développer sa conscience externe pour survivre au mieux dans le monde extérieur. Pour cela donc, un milieu protégé est nécessaire au début, duquel il faut savoir s’extraire aussi, pour parfaire l’intégration extérieur / intérieur et ne pas tomber dans l’effet « secte », qui est un autre problème.