Le grand Cairn de Barnenez

La vision intégrative

La vision intégrative, c’est  pouvoir parler des sujets les plus variés,  dans tous les domaines de la vie, avec la possibilité de les relier les uns aux autres, car dans cette vision tout est interdépendant et relève d’une unité exprimée par le Tout, de plus, tout est digne d’intérêt, tout est porteur de sens,  car tout est  éclairé  par le Tout, tout demande à témoigner du Tout, dans une profonde unité.

La fascination du premier contact

Il y a une quinzaine de jours, j’ai eu la chance de découvrir le grand Cairn de Barnenez.
Pour moi ce fut une rencontre mémorable avec un mastodonte au grand corps tout hérissé de pierres,
et qui s’avance comme en rampant vers la mer,
dans un lent mouvement venu du fond des âges.
Je suis resté là longtemps, immobile devant ce spectacle incroyable,
en une sorte de sidération pétrifiée.
Puis, en marchant lentement de la gauche vers la droite,
j’ai commencé la circumbulation sacrée,
telle qu’on peut la pratiquer méditativement autour d’un stupa bouddhiste.
Quelque chose de très fort voulait s’exprimer là,
dont je n’ai pas compris clairement le message sur le moment,
même si cela fit pression à l’intérieur de moi-même,
à tel point que j’ai eu envie d’écrire cet article.

Une brutale découverte

Nous sommes en Bretagne, dans le Finistère, en face de la baie de Morlaix, sur la pointe de Barnenez.
En 1955 le Cairn rentre brusquement dans l’actualité avec un scandale retentissant, dont notre époque s’est faite une spécialité :
un entrepreneur en bâtiment construisant une route dans les environs,
s’est mis en tête dans une superbe ignorance, cynisme, mépris, stupidité,
goût du lucre et de la rentabilité – c’est au choix -,
d’exploiter le superbe gisement de pierres de ce Cairn, qui pourtant est respecté dans la région depuis des générations,
même si on ne sait pas trop à quoi il a servi et que d’étranges légendes de korrigans  rodent à son sujet.

Heureusement, un journaliste de Morlaix a vent de l’affaire,
il sonne l’alerte en écrivant un article,
et le scandale heureusement va monter très vite jusqu’au ministère.
Une action en justice est menée
à l’encontre de l’entrepreneur peu scrupuleux,
qui a eu le temps tout de même d’éventrer une chambre funéraire.
Celui-ci est condamné bientôt à une lourde amende équivalente à la remise en état du monument mutilé.
Le Cairn de Barnenez est sauvé in extremis et fait une entrée remarquée dans le monde culturel de l’époque :
André Malraux n’a-t-il pas parlé d‘un « Parthénon de la préhistoire ».

Je viens de dire en début de chapitre que notre époque s’est faite une spécialité de ce genre de scandale ;
l’actualité la plus récente ne me dément pas :
je viens de lire dans le journal « Le Monde » daté du lundi 21 mai 2012,
que le site de Babylone en Irak est menacé, voire profané par un oléoduc,
construit par quelque « pétrolier » en mal de rentabilité,
se contrefichant  de l’illustre cité sumérienne du 2e millénaire av. J.C.,
sa tour de Babel et ses jardins suspendus,
– pétrolier ayant été précédé dans ce vandalisme
par quelques soudards américains et polonais de la guerre irakienne,
afin de construire sur les champs de céramiques et de pierres décorées,
quelques pistes d’atterrissage bétonnées pour hélicoptères en vadrouille.

La datation au radiocarbone 14

En 1955, une nouvelle méthode de datation vient d’être découverte par un chimiste américain du nom de Williard Libby – ce qui lui vaut un prix Nobel en 1960.
Cela va complétement révolutionner la vision que l’on avait des monuments mégalithiques, et le Cairn de Barnenez ne va pas y échapper.
Fini l’estimation à courte vue de ces vestiges entre 2500 et 1500 ans av. J. C.
qui rétrécissait les esprits sur l’hypothèse d’une imprégnation des peuples du néolithique  par la culture méditerranéenne.
Grâce au radiocarbone 14, Barnenez, comme beaucoup d’autres monuments mégalithiques, en particulier à Carnac, sonnent allégrement leurs  « – 5000 ans à – 3000 ans av JC ».
Cela change beaucoup de choses sur la pseudo-influence des peuples méditerranéens.
Il faut faire d’autres hypothèses, en direction d’autres influences culturelles, que l’on a pas encore complétement élucidées.
Est-ce que ce ne seraient pas au contraire, ces très anciennes cultures mégalithiques qui ont influencé la culture méditerranéenne, via l’Egypte ?

Mausolée funéraire ou temple voué à la méditation ?

Ce n’est pas fini au sujet des hypothèses à courte vue des archéologues en titre.
Certes la découverte du radiocarbone 14 est une réelle avancée de la science,
mais les hypothèses qui s’ensuivent restent d’une grande indigence de l’esprit.
On répète comme une ennuyeuse litanie sur tous les documents à lire :
« le Cairn renferme en son sein onze chambres funéraires reliées à l’extérieur par d’étroits couloirs voûtés« .
Il n’a été trouvé aucune trace d’ossements, mais cela n’a aucune importance, car pour les archéologues, c’est à cause de l’acidité des sols !
En vérité, s’agit-il vraiment de chambres funéraires ? Le Cairn de Barnenez est-il un mausolée pour enterrer les morts prestigieux ?

Il m’est apparu en une sorte d’évidence intuitive que le monument était plutôt un temple réservé aux vivants,
c’est à dire un espace sacré,  séparé du monde profane – comme l’indique l’étymologie du mot « temple »-,
afin que les chamanes, les prêtres de l’époque puissent s’y retirer pour « con-templer » l’Autre Monde,
le Monde d’en Haut, le Monde Invisible, le Monde qui constitue la dimension spirituelle de l’être humain,
et que l’on atteint de l’intérieur par une profonde méditation en de tels lieux.
Ces onze chambres  situées en plein milieu du Cairn, ne seraient-elles pas des lieux de méditation parfaits au coeur de cet énorme temple de pierres,
afin d’accéder à la Connaissance spirituelle profonde et à tous les pouvoirs psychiques des chamanes ?
D’ailleurs, cette pratique consistant à s’isoler ainsi dans l’obscurité de la terre et du monde minéral, ne fait-elle pas penser aux séjours des ascètes de l’Inde ou du Tibet dans les grottes obscures de leurs montagnes,
ou à l’initiation des « mamus »,  ces chamanes du peuple des Kogis vivant en Colombie, qui passent 19 ans dans l’isolement des grottes de la Sierra ?
Il y aurait encore beaucoup à dire sur la puissance méditative des lieux d’obscurité à l’intérieur de la terre,
comme matrice à l’origine de toute création,
ou comme possibilité de se relier à la Terre-Mère et aux puissances de la Nature,
– tout ce qui fait l’essentiel du chamanisme des peuples premiers,
mais nous en resterons là :

le grand Cairn de Barnenez recèle d’abord une formidable  puissance d’interpellation,
pour nous, occidentaux égarés dans la cacophonie de nos villes, dans le monde profane de la société de l’hyperconsommation matérielle,
nous qui avons perdu ce sens de la retraite à finalité spirituelle,
nous qui errons dangereusement à la lisière d’un désastre total,
dont l’origine est d’abord un désastre de notre Esprit ayant perdu sa connexion au Tout et en particulier sa connexion à la Terre- Mère.
Tourner silencieusement autour de ce temple de pierres sacrées,
c’est recevoir une invitation à l’Essentiel,
c’est se réveiller à la mémoire la plus ancienne,
– celle de notre part divine -,
cette déambulation silencieuse, c’est comme un début d’initiation
– encore faut-il être prêt !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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2 réponses à “Le grand Cairn de Barnenez”

  1. Claudine Degoul dit :

    Oui en effet, ce « monstre » est stupéfiant ! Pourquoi est-il si peu connu du grand public ? J’avoue que je fais là une découverte qui m’a beaucoup intéressée, et je me suis précipitée sur les sites qui en donnent des photos. Les vues d’avion sont sidérantes: on croirait voir un blockhaus sorti de la 2° guerre mondiale, tellement la masse est impressionnante.

    De près, on peut voir la maîtrise de la construction dans les arcs bien équilibrés, dans les banquettes bien adaptées au terrain. Ce monument fait preuve d’une grande expérience, ce qui laisse supposer qu’il a été précédé par biens d’autres dont nous n’avons pas, ou pas encore retrouvé la trace. En outre il ne peut avoir été édifié que par une société déjà très structurée, organisant un travail collectif au profit de….? des puissants qui avaient fait leur apparition? d’une religion? Nous ne le saurons sans doute jamais.

    Ce monument est en effet plus ancien que les Pyramides. Mais il est à peu près certain qu’il n’y a pas eu d’influence réciproque; c’est trop loin et trop différent. Et les peuples sont assez avancés pour avoir mis au point, chacun de leur côté, des techniques de construction autonomes; de même que l’agriculture a été mise au point de manière indépendante dans différents points du globe.
    En outre, pendant toute la préhistoire, les migrations et les progrès techniques se sont effectués de l’Est vers l’Ouest, comme le montre une grande quantité de datations comparatives. Mais il est vrai que dans ce mouvement général, l’axe méditerranéen est secondaire; la route principale a été l’axe danubien. La Méditerranée ne devient importante qu’à l’époque historique.

    Enfin, à quoi ce monument servait-il ? Je penche pour des tombes aménagées pour un groupe puissant. Il n’y a pas de squelettes, c’est en effet gênant, et je ne connais rien au problème de l’acidité des sols; peut-être les tombes étaient-elles préparées et l’inhumation n’a pas eu lieu pour des raisons que nous ignorerons toujours. Ce qui est certain, c’est que cette structure (couloir mégalithique, chambre au bout, le tout recouvert d’un tumulus de terre ou de pierres) est connue dans toute l’Europe depuis la préhistoire jusqu’au II° siècle av. J. C. (les tombes Scythes des steppes du nord de la Caspienne) pour être des tombes, la plupart du temps de manière certaine.

    Un temple ? Je n’y crois pas trop. Les espaces intérieurs sont trop petits pour rassembler du monde. La civilisation mégalithique semble plutôt connue pour avoir pratiqué une religion de plein air en relation avec les astres. Quoiqu’il en soit, il s’agit toujours d’un lieu chargé de spiritualité.

    • merci Claudine pour ce long message qui prête à discussion et à échange d’idées :
      Vous dites : « des puissants qui avaient fait leur apparition? d’une religion? Nous ne le saurons sans doute jamais. » Nous savons que les puissants à l’origine des civilisations étaient les prêtres ou chamanes, ils étaient chargés de la relation entre les hommes et les dieux. Les théories évolutives sont assez d’accord sur ce point, en particulier quand elles parlent des chasseurs-cueilleurs et des premières civilisations.
      Vous dites aussi : « ce monument est en effet plus ancien que les Pyramides. Mais il est à peu près certain qu’il n’y a pas eu d’influence réciproque; » cela n’est pas certain justement, il y a des hypothèses qui disent l’inverse et il y a de troublantes analogies géométriques par exemple entre la disposition des mégalithes et la science géométrique qui a réussi à construire Khéops.
      Vous dites encore « pendant toute la préhistoire, les migrations et les progrès techniques se sont effectués de l’Est vers l’Ouest, » je crois que là encore, il n’y a plus autant de certitudes, mais je n’ai pas assez d’informations sur ce point.
      Enfin vous dites : « Un temple ? Je n’y crois pas trop. Les espaces intérieurs sont trop petits… », c’est là où je serai le plus critique, car il s’agit dans mon esprit d’un temple très ancien, peut-être un des premiers temples, où l’espace sacré n’est pas encore collectif comme on le voit dans les temples postérieures qui doivent effectivement abriter la tribu ou le groupe. Ici, ce serait un espace réservé aux seuls chamanes pour qu’ils puissent s’adonner à leurs pratiques, en particulier à leurs pratiques méditatives afin de se relier à la Terre-Mère. Pour cela il n’y a pas besoin de beaucoup de place, au contraire.
      Mais bien sûr, il n’y a là que des hypothèses personnelles pour alimenter la discussion et la réflexion, au delà de tout dogmatisme.