Les nabatéens, vous connaissez ?


Les nabatéens ont construit la ville mythique de Petra,
l’une des sept merveilles du monde, il y a très longtemps, dés le 5e siècle avant JC jusqu’aux environs du 4e siècle après JC.
C’étaient des bédouins du désert, vivant au nord de l’Arabie Séoudite et dans la Jordanie actuelle, une région bien placée à l’époque,  sur un chemin commerçant menant  vers la route de la soie.
Marchands habiles, monnayant l’encens, la myrrhe et les épices,  ils ont fait rapidement fortune et ont investi avec génie leur argent dans l’édification de cette superbe ville.
Tout cela vous pouvez le trouver dans n’importe quel guide touristique, avec force détails, en particulier sur l’architecture des temples de Petra, chefs-d’oeuvre d’une remarquable intégration entre les influences égyptiennes, grecques, romaines, etc…

Mais qu’est-ce qui différencie ces marchands nabatéens d’autrefois, des marchands de pétrole actuels de la péninsule arabique ?

A première vue, ce sont des marchands qui se ressemblent :  le même génie du commerce capable d’amasser des fortunes rapidement, les uns en faisant fructifier les pétro-dollars, les autres en profitant des droits de péage d’un chemin pratique vers la route de la soie ;
le même désir d’étaler ses richesses en édifiant des villes grandioses dans le désert et en attirant les architectes les plus doués de leur époque : les uns avec Dubaï et ses tours high tech, les plus hautes du monde ; les autres avec tous ces temples creusés délicatement dans la magnificence des falaises de grès rose.

Mais il y a en réalité une grande différence de culture et d’intention profonde dans l’édification des ces villes.
Pour les uns, c’est la folie matérialiste d’un monde déboussolé qui a perdu le sens, une sorte d’excroissance de puissance et de pouvoir voulant triompher artificiellement de la nature, à coup de dollars et de bulles spéculatives,  tours dérisoires voulant jouir toujours plus haut des plaisirs de l’hyperconsommation, fragiles paravents dressés contre l’angoisse d’une  mort inéluctable.
Pour les nabatéens, il s’agissait de construire des temples, dont la fonction essentielle était  d’accueillir des tombeaux, au milieu de grandes salles vides, – on a cru longtemps que Petra était une nécropole -, temples dont la fonction la plus noble était d’honorer la mort sous la protection des dieux et des esprits tutélaires ;
spiritualité profonde venant de l’Egypte ancienne, où la mort et le culte des morts ont accompagné les spéculations métaphysiques les plus hautes et les plus profondes, dont l’être humain ait été capable – spiritualité à l’origine de toutes les grandes religions monothéistes du désert.
Combien d’années tiendront ces fragiles tours de verre et d’acier face aux indestructibles temples nabatéens blottis dans la pierre ? Et pourquoi une telle décadence culturelle ?

Quant aux bédouins  de Petra, sans doute les descendants de ces fiers nabatéens,

ils ont été chassés il y a 25 ans de  leurs tentes élégantes et de leurs caves troglodytes, pour laisser le site de Petra aux devises des touristes.
On les a relogés dans un village de briques et de parpaings entourés déjà à sa périphérie, de terrains vagues couverts de détritus, sacs plastiques déchirés, poubelles éventrées, où des dromadaires enfermés dans des quadrilatères de parpaings, semblent mortellement s’ennuyer en mâchonnant quelques maigres fourrages.
Dans la pénombre, près d’un grand container débordant d’ordures, un petit âne me regarde passer avec toute la tristesse du monde, la tristesse de ceux qui ont été exilés

Pour ce jour de Toussaint dédié traditionnellement aux morts, je voulais rendre hommage à ces nabatéens courageux qui ont édifié Petra, une des plus belles villes du monde consacrée essentiellement au culte des morts,
jour de la Toussaint où je commençais il y a un an ce blog, pour parler à ma manière de la mort.

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Une réponse à “Les nabatéens, vous connaissez ?”

  1. Virginie dit :

    Merci pour cet historique comparatif sur Pétra et sa population, passée et présente. Je vais en Jordanie début avril rendre visite à des amis qui y vivent et bien sûr, je compte aller voir cette merveille qu’est Pétra. Et je serai, hélas, obligée de me transformer en touriste pour ce faire puisqu’il n’y a pas moyen de faire autrement. Mais mes yeux, je l’espère, sauront voir au-delà du visible… Je mettrai ces photos sur mon blog à mon retour, je t’invite à venir y faire un tour: http://www.vrinini.canalblog.com. A bientôt!