A propos du dernier livre de Jean Staune « Les clés du futur »
J’étais parti pour faire le commentaire du dernier livre de Jean Staune « Les clés du futur »(1),
mais au fur et à mesure de ma lecture, j’ai trouvé ce livre de 700 pages, consacré à une analyse et une prospective du monde actuel, un peu long,
sans avoir vraiment envie de « réinventer ensemble la société, l’économie et la science »,
comme nous y invite l’auteur dans le sous-titre de son livre.
De plus, une critique (2), à mon sens déplacée, contre Pierre Rabhi et le journal la Décroissance ,
m’a donné d’abord envie, en guise de réponse, de me tourner encore une fois,
vers le vieux Lao-Tseu et sa sagesse éternelle, toujours d’actualité…
Lorsque le Tao menait le monde
Lorsque le Tao menait le monde
les chevaux n’avaient pas de selle,
ils servaient au labour des champs.Quand le Tao disparut
les chevaux de bataille apparurent aux frontières.Il n’est pas de plus grande erreur
que de suivre aveuglément ses désirs.
Il n’est pas de plus grand malheur que de désirer toujours plus.
Qui sait être satisfait, est toujours heureux.
Lao Tseu Tao tö king 46 traduction Chao-Hsiu Chen (3)
Une transformation intérieure en profondeur
De quelle pertinente actualité témoigne ce verset du Tao tö king écrit il y a 2500 ans !
L’histoire humaine serait-elle un éternel recommencement se cachant derrière des formes nouvelles,
ou un surplace éloquent, malgré les fanfaronnades du progrès de la transmodernité ?
Car ce texte pourrait très bien figurer en exergue d’une critique radicale de notre société contemporaine de l’hyperconsommation généralisée,
où c’est le désir du « toujours plus » qui nous entraîne dans sa folle spirale :
une croissance matérielle et virtuelle insensée,
aiguisant les appétits guerriers de chacun,
à moins que ce soit l’anesthésie addictive du consumérisme,
jusqu’à mettre en péril l’équilibre écologique et la survie de l’espèce humaine.
Pour changer le cours des choses,
il nous est demandé d’abord une transformation intérieure en profondeur :
il s’agit de se relier de nouveau au Tao,
d’aucuns diraient à la Voie, au Soi, Au Vide, au Tout, à Dieu
– à condition que ce Dieu soit sans nom ni forme pour éviter toute restriction possessive et belliqueuse.
C’est aussi le programme de la la sagesse éternelle,
dont témoignent toutes les traditions spirituelles.
avec au bout du compte ce résultat le plus important :
la simplicité,
le désir rare,
savoir se contenter de peu,
tout au plus l’unique désir d’appartenir à l’immanence divine du Tout,
en silence,
dans l’émerveillement de l’Etre en son éternel présent.
Alors les chevaux n’auront plus de selle
et recommenceront tout simplement leur labour,
pour que nous puissions renaître à une vie nouvelle,
prisonniers que nous sommes de ces tracteurs artificiels,
qui s’en vont déverser sur nos champs leurs mortels pesticides,
pour nous empoisonner et nous délabrer toujours plus.
Il s’agit d’ailleurs, en quelque sorte et en d’autres termes,
du programme radical de « la Décroissance »,
ou la frugalité heureuse de Pierre Rabhi,
avec en priorité, cette obligation d’une croissance spirituelle nécessaire
pour un nouvel équilibre intérieur qui seul pourrait nous sauver d’un prochain désastre collectif.
Pour revenir au livre de Jean Staune
Je voudrais maintenant revenir sur le livre de Jean Staune « Les clés du futur ».
Je ressens par rapport à celui-ci une certaine d’ambivalence :
D’un côté, il s’agit bien sûr d’un livre intéressant, très bien documenté,
écrit de cette intelligence supérieure, dont témoignent les livres précédents (4) et les multiples activités (5) de l’auteur,
en particulier pour mettre des ponts entre le développement actuel des sciences et les ouvertures spirituelles qu’elles inspirent (6).
Ce livre est donc un état des lieux du monde actuel et ses développements futurs en ce qui concerne les sciences, la société, l’économie, l’écologie, l’entreprise, etc,
avec un sens de la prospective et de l’évolution possible de l’humanité tout à fait pertinent et optimiste avec son schéma évolutif « prémodernité – modernité – postmodernité et transmodernité »,
faisant penser aux schémas du philosophe évolutioniste américain Ken Wilber, dont j’ai beaucoup parlé sur ce blog, inspiré lui aussi par la philosophie évolutive de Teilhard de Chardin (7).
Mais d’un autre côté, ce livre m’a parfois ennuyé, voire énervé, et je me suis longuement interrogé pourquoi :
D’abord, je ne partage pas l’optimisme de l’auteur, en ce qui concerne l’évolution actuelle de l’humanité.
Il s’agit d’un paradigme philosophique, fondé sur une foi dans les progrès de la techno-science, qui ouvrirait sur un neocapitalisme de plus en plus responsable et moral, accompagné d’une écologie positive permettant une croissance dans le développement durable, avec des entreprises éthiques s’adonnant au « business social » et au microcrédit du professeur Yunus, ainsi qu’au commerce équitable.
Même si j’aime la plupart de ces nombreux exemples cités, porteurs d’espoir, en particulier le travail du Professeur Yunus,
au risque de me faire accuser d' »antihumaniste voué au bûcher », je ne suis pas du tout sûr que les 7 milliards d’êtres humains que nous sommes, vont s’en sortir grâce au capitalisme mondialisé et la magie des nouvelles technologies, dont le Transhumanisme » serait plutôt un cauchemardesque repoussoir.
– d’ailleurs, il y a peu de place accordée dans le livre (8), pour dénoncer les dérives de ce fléau transhumaniste, conduisant à un absolutisme technologique mondialisé, où l’être humain n’aura plus sa place, si ce n’est chez les « métabarons » milliardaires du côté de chez Google adeptes de leur prophète Ray Kurzweil…
De plus, il y a dans ce livre un peu long, une sorte de foi dans l’accumulation du savoir,
comme si le fait d’accumuler les informations nous permettait de donner Sens à ce monde et d’atteindre à sa Vérité.
La première conséquence c’est le danger des dérapages dogmatiques, que cette foi dans le savoir vrai peut entraîner parfois, comme cette charge contre Pierre Rabbhi accusé de ne pas rentrer dans le schéma évolutif parfait, avec « son pêché de retour à la prémodernité » – on a connu la même dérive avec Ken Wilber.
Il y a parfois aussi une propension à la prophétie informationnelle
– dans le style de Jacques Attali…
Cela rentre pourtant en contradiction avec les paradigmes scientifiques actuels pourtant amplement soulignés par l’auteur (9) : le principe d’incertitude d’Heisenberg et les transformations aléatoires du champ quantique, l’effet papillon, la théorie du Chaos de Prigogine et le principe d’incohérence de Gödel, etc.
Pour ma part, je préfère me réfugier dans le mystère en son incertitude foncière,
surtout en ce qui concerne l’évolution collective de l’espèce humaine me semblant être de plus en plus un système d’évolution / involution cyclique totalement imprédictible.
Je ne sais comment cela peut tourner ; il y a autant de chance pour que nous trouvions la porte d’une sortie évolutive honorable, que d’être soumis à l’extinction de notre espèce, comme j’en ai parlé dans un article précédent.
En fait, paradoxalement, ce savoir pléthorique ne serait pas tout à fait complet.
Il lui manque une dimension essentielle, celle de l’évolution individuelle intérieure de la conscience.
Il me semble très éclairant d’aller voir le schéma des quatre quadrants de Ken Wilber, où l’évolution humaine est partagée en quatre dimensions : la dimension collective et la dimension individuelle vues à chaque fois sous l’angle intérieur et extérieur ou subjectif et objectif.
Il manque dans ce livre une réflexion sur l’évolution de la conscience individuelle intérieure ou subjective, propre à notre époque.
Il nous parle bien des signes de l’évolution collective intérieure avec l’avènement des sciences les plus récentes qui permettraient un changement de vision, mais cela ne me semble pas suffisant.
Cet avènement techno-scientifique peut aussi bien nous faire involuer dans l’horreur,
il ne porte pas en lui les signes suffisants de l’évolution intérieure nécessaire de la conscience humaine,
il doit être inclu et transcendé dans une dimension supérieure plus profonde et plus globale :
La Transmodernité, ce serait alors en priorité, la possibilité de trouver le chemin intérieur d’une Transcendance nouvelle de plus en plus nécessaire :
A part le chapitre réservé aux Créatifs Culturels (10), qui évoque cette possibilité de nouvelle transcendance au niveau collectif,
il manque dans ce livre les traces de l’expérience intérieure individuelle,
comme un préalable nécessaire à notre époque ;
Il s’agit moins d’imaginer une nouvelle société,
que de mettre de l’ordre au plus profond de notre être,
afin de créer un état de conscience de l’être humain,
capable de ne pas retomber encore une fois, progrès techno-scientifique à l’appui,
dans les errances de son cerveau archaïque et prédateur.
Et c’est justement cela que Pierre Rabhi explore avec sa « frugalité heureuse »,
ou que Lao-tseu proclame dans son immortel petit livre de 81 pages,
après avoir quitté les mirages et les mensonges de la cour de l’empereur de Chine.
En conclusion, revenons donc à Lao-Tseu
J’ai bien aimé que Jean Staune cite Lao Tseu (11) en cette profusion de pages,
et je conclurai avec sa citation, m’abritant encore une fois derrière le vieux sage-poète au regard malicieux :
Nous joignons des rayons
pour en faire une roue,
mais c’est le Vide du moyeu
qui permet au chariot d’avancer (12)
Cette phrase m’a donné envie de l’illustrer par deux dessins similaires, figurant en exergue de cet article.
Le premier est l’oeuvre de Chao-Hsiu Chen traductrice du Tao tö King en anglais, paru sous la forme d’un jeu de cartes, dont le verso de chacune est illustré par une calligraphie de l’auteure.
Celle-ci illustre la première carte du Tao intitulée « le mystère » : « Quand on la nomme, la Voie n’est plus la Voie… »
Le deuxième est l’oeuvre d’Anne de Constantin organisatrice avec Jean Staune du colloque récent, dont j’ai parlé (5). elle est aussi peintre et a réalisé cette figure pour symboliser le sens de ce colloque, perçu par l’artiste de manière intuitive.
Les deux dessins se ressemblent étrangement :
ils évoquent bien ce que j’ai pu ressentir à la lecture du livre de Jean Staune :
il y a ce cercle trop parfait, qui peut tendre à l’emprisonnement ou tourner en rond sur lui-même,
s’il n’est pas suffisamment ouvert sur le Vide du moyeu de la roue,
et sur l’Infini qui l’enserre.
(1) « Les clés du futur, réinventons ensemble la société, l’économie et la science » ed. Plon mai 2015
(2) dans la paragraphe « Décroître, disent-ils » p. 457
(3) dans un jeu de cartes du Tao tö king édité aux éditions Courrier du Livre
(4) en particulier le livre « Notre existence a-t-elle un sens ? » ed. Presses de la Renaissance Paris 2007, très bien commenté et résumé dans le blog de Denis Brossier « Le Temple des Consciences »
(5) par exemple l’organisation du colloque international « Science et Connaissance, de la matière à l’Esprit » du 9 janvier 2016, organisé avec l’UIP et la Fondation Denis Guichard, auquel j’ai d’ailleurs assisté.
(6) lire le chapitre « Une révolution silencieuse qui ne fait que commencer » I, 4 (p. 135 à 177)
(7) voir le chapitre « Les quatre cavaliers de la transmodernité » page 333
(8) une petite dizaine de pages en début de livre pages 46 à 56 dans la partie 1 « la révolution fulgurante ».
(9) pages 100 à 179 dans les parties 3 et 4 « La particule et le papillon et « Une révolution silencieuse qui ne fait que commencer ».
(10) voir le chapitre « Etes-vous un créatif culturel ? » p. 343 à 386
(11) page 332 dans un chapitre annonçant la « transmodernité »
(12) Tao tö King 11 Traduction Stephen Mitchell Synchroniques Editions
Tags : conscience, Ken-Wilber, livres, sagesse, sciences, société, spiritualité, taoïsme
Certes le Tao ne mène pas le Monde dans le sens où il en serait la manifestation éclatante aujourd’hui, d’où l’emploi de l’im-parfait, n’empêche c’est quand même le Tao qui mène la puissance de vie, y’a juste qu’elle est tout endormie cette force du Tao, mais elle est là, sinon le monde dégringolerait et nous ne serions pas là pour en parler.
Ne tiens qu’à nous de la réveiller pour faire en sorte qu’elle retrouve son bel éclat dont nous sommes possiblement les dépositaires!
Vous faites bien Catherine de poser la question de cet imparfait.
D’une certaine manière, le Tao mène toujours le monde et de toute éternité, puisque le Tao est le Tout de ce monde, Il est le monde et c’est Lui qui mène la grande danse cosmique.
Quand Lao-tseu utilise l’imparfait, c’est pour désigner la relation perdue de l’être humain à ce Tout. A partir du moment où l’être humain oublie sa connexion au Tout, oublie sa dimension transcendante, alors le Tao ne mène plus le petit monde dans lequel il vit. Quand le Tao est oublié par l’homme, alors Il ne se manifeste plus dans son monde devenu étriqué et egocentique, où l’être humain se prend pour le nombril du monde, se prend pour Dieu, comme le dit Bertrand Vergely dans son dernier livre au sujet du Transhumanisme.
Alors, il est légitime de craindre le pire…
Je ne crois pas que j’aimerais lire le premier livre cité, trop hardu pour moi, complexe. Car le Tao est tellement plus simple et vrai, on a tant besoin d’un retour à l’essentiel . J’aimerais mieux lire un livre de Christian Bourit, » Votre Vie est un jeu quantique », plus gai, plus simple, plus naïf aussi.
Je suis lasse de tous ces concepts compliqués dans ce monde compliqué qui détruit la vie à la racine , outrecuidance de nos egos démesurés et insatiables.
Vive le vieux taoïsme et les simples.
Se changer soi et poser un autre regard sur le monde, c’est ça mon effet papillon à moi.
J’ai lu de Jean Staune, son livre »Notre existence a-t-elle un sens » et je l’ai trouvé tout à fait remarquable en tant que vue globalisante de tout ce qui touche à l’existence.
Pour faire écho à ce que vous dites annyrondelle, je crois que le simple est une figure d’achèvement et qu’avant d’arriver à ce « dépouillé »à cette « nudité » il faut passer par le complexe, le compliqué, tenter de le traverser, car à moins d’être un sage spontané, ce travail ne saurait être sauté au risque de se prendre un coup de boomerang dans la figure, histoire de nous rappeler que nous avons oublié quelque chose.
oui, moi aussi, j’ai trouvé ce livre « Notre existence a-t-elle un sens » beaucoup plus intéressant que celui-ci, au sens où il était prioritairement préoccupé de Transcendance, ce qui n’est plus le cas ici.
Est-ce qu’il faut passer par le complexe et le compliqué avant de découvrir la simplicité de la sagesse ?
Peut-être effectivement, car le complexe et le compliqué c’est le fruit pourri du mental dans ses désirs et sa démesure egocentrique. Mais, cette complexité ne mène pas obligatoirement à la sagesse, loin s’en faut ! Pour en finir avec celle-ci, afin de passer dans la sagesse, je crois qu’il faut un ingrédient supplémentaire.
Pour ma part, je crois qu’il s’agit de la souffrance d’une totale impasse, afin que toutes les illusions du mental s’écroulent et que l’être humain puisse se tourner enfin vers sa Nature profonde : Conscience – Amour, c’est très simple…
Votre site informatique, dont fait partie ce blog, n’est-il pas, Alain, une création COMPLEXE de votre MENTAL?
oui, c’est utiliser le mental pour jeter la suspicion sur le mental, le mettre à sa juste place, c’est à dire le plus souvent de côté…
Ma réponse est un peu incomplète :
sur mon site internet, j’utilise effectivement le mental de manière informationnelle dans l’intention première de donner une idée de ce que signifie pour moi la psychothérapie intégrative.
Mais si l’on lit attentivement ce site on voit bien l’importance que j’accorde à la dimension « transpersonnelle » ou spirituelle, comme chemin suprême de guérison.
C’est là que le mental est utilisé pour donner envie d’accéder à une dimension intérieure, où ce n’est plus le mental qui règne. Quand je dis que dans cette dimension, c’est le silence ou le mystère ou le vide ou l’infini ou la supraconscience qui sont à vivre dans une expérience intime d’ordre religieux ou plutôt mystique, qu’on ne peut décrire par les mots,
alors j’utilise les mots du mental pour donner envie d’aller au delà du mental et de ces mots.
Dans mon blog qui appartient aussi à mon site, comme un développement ultérieur de celui-ci, outre des sujets qui auraient très bien pu figurer en tant que pages classiques de mon site comme des compte-rendu de livres, des interviews, des réflexions sur des techniques psy (telle la pleine-conscience), j’ai voulu apporter en plus l’importance pour moi de l’expression artistique et en particulier de la poésie.
Là, on retrouve encore l’envie de dépasser l’utilisation conventionnelle du mental dédié principalement à la raison et à son mode d’expression privilégiée : la prose. Dans la poésie, le mental se troue pour ainsi dire de silence. Il laisse la place à autre chose, que l’on pourrait appeler une co-naissance par opposition à un savoir, une expérience intérieure silencieuse au delà des mots.
J’espère avoir répondu François à votre questionnement justifié.
Merci, Alain d’avoir, ce 10 mars, complété votre réponse de la veille.
A première vue, celle-ci m’avait choqué. Puis en la relisant, j’ai pensé : « lui-même verra que ça cloche », et j’ai bien fait d’attendre.
Mais en quoi ai-je été choqué?
Votre première mouture, je l’ai comprise ainsi:
« moi, OK, j’utilise le mental, mais c’est pour la bonne cause ». Sous-entendu « la fin justifie les moyens ».
Votre seconde réponse nuance cette impression. Je la résumerais ainsi : « OK, j’utilise le mental, parce que je ne vois pas d’autre moyen de faire aimer ce silence intérieur que j’aime et qui est pour moi guérison, et je suis cohérent, car souvent je privilégie la poésie, hors mental ».
Alors, où demeure ma gêne?
Le 9 mars vous dites vouloir « jeter la suspicion sur le mental » et le 10 viser en thérapeute à la « guérison ».
Mais dans quelle mesure la « suspicion » est-elle outil thérapeutique?
Soupçonner n’est-ce pas culpabiliser?
Faut-il culpabiliser?
Rendre l’autre conscient du mal qu’il fait, je dirais oui.
Mais le culpabiliser de ne pas suivre une « loi » qu’on dit enfreindre soi-même pour la bonne cause, une « loi » implicitement présentée en dogme?
Ca me rappelle les docteurs juifs de l’Evangile, ça me rappelle le clergé chrétien qui culpabilise sur les questions sexuelles.
Laisser entendre, quand on a une autorité morale, que le mental, la sexualité… sont intrinsèquement mauvais,
conduire le confessé, le patient, à reconnaître qu’il n’a pas encore vaincu son mental, sa sexualité…
et qu’il doit poursuivre le combat intérieur, retenir ainsi le patient, le confessé les yeux fixés sur un idéal quasi hors d’atteinte…
stériliser ainsi son énergie?
Je préfère Pascal et ses trois ordres : la matière;
plus haut, l’esprit, le « mental », car « toute notre dignité réside dans la pensée »,
et plus haut encore « le cœur », la « charité ».
J’aime que votre tempérament vous fasse percevoir la grandeur du « cœur », de « l’amour »,
mais comment ne pas transformer nos penchants en dogmes culpabilisant autrui?
Ce n’est facile pour personne.
Mon Dieu, quel dialogue de sourds, François, tout à fait emblématique des combats de coqs dont le mental raffole par dessus tout pour se protéger et protéger son ego.
Me voir comparer aux docteurs juifs de l’évangile et au clergé chrétien me laisse songeur, tout en me faisant beaucoup rire, tellement cela me parait absurd et si loin de mon univers (mental), idem pour l’amalgame de la culpabilisation de la sexualité et du mental.
Pourtant pour vous plaisir afin que votre mental puisse se jeter en pâture sur ma réponse, je vais tenter une petite réflexion, mais sans espoir…
Loin de moi, en ce qui concerne le mental l’idée de vous culpabiliser ou de culpabiliser quiconque. Pour moi,ce que je dis sur le mental – et cela n’a rien à voir avec la sexualité – fait référence principalement à deux choses :
– un schéma évolutif de l’être humain à quatre niveaux : le niveau physique, le niveau émotionnel, le niveau mental, et enfin la Conscience pure ou le niveau Transpersonnel dont la meilleure expression se fait dans l’Amour inconditionnel.
Ce schéma est emprunté à la « philosophie éternelle » (dirait Aldous Huxley) et il est amplement développé par Ken Wilber, qui reste ma référence philosophique et mentale privilégiée. Vous y faites d’ailleurs allusion à votre manière en fin de message avec la matière / l’esprit, mental / le coeur, avec pour moi une confusion entre le mental et l’Esprit, qui ne sont pas du tout sur le même plan, et une omission de l’émotionnel – ce qui ne m’étonne pas.
Cela c’est pour la référence philosophique et mentale. Il s’agit une référence évolutive de l’être humain.
Loin de moi l’intention de le culpabiliser, parce qu’il plafonne au niveau émotionnel ou mental, mais plutôt l’idée de faire briller en lui ce que je pourrais appeler l’élan évolutif vers la pure ou pleine Conscience et l’Amour.
S’il se sent coupable, ce n’est pas mon problème, cela est une projection intérieure qui a à voir avec son système d’éducation, sa programmation infantile.
– la deuxième chose qui permet de comprendre ce que je dis sur le mental en le dépréciant volontairement vient d’une expérience intime qui a à voir principalement avec la méditation, telle que l’ai apprise et expérimentée dans la tradition orientale, en particulier bouddhiste et taoïste via le qi gong. Là j’ai découvert un espace intérieur au fond de moi même qui n’a plus rien à voir avec le mental et qui est d’abord silence, Vide et profond bien-être… et où il n’y a plus de mots possibles.
Bonne soirée
–
merci, Alain.
Vous ne m’apprenez rien de neuf.
Je précise deux choses simplement:
1) qui est-on? ce qu’on perçoit de soi? je veux dire ses « intentions »?
ou ce que les autres perçoivent de vous?
Les deux je crois.
Pour me connaître moi-même, j’apprécie l’aller et retour constant du regard de l’autre sur moi à mon propre regard sur moi.
Qu’en pensez-vous?
2) Pourquoi ai-je parlé de « culpabilité »?
« ce n’est pas mon problème » dites-vous etc.
Pourtant J’ai cru percevoir en vous de la « culpabilité » parce que, vous qui dénigrez le mental, il m’a semblé que vos deux réponses à mon message du 9 mars exprimaient un besoin de se justifier contre mon accusation implicite : « vous n’êtes pas cohérent, vous ne faites pas ce que vous dites ». Il m’a semblé que ce reproche vous touchait, ce que j’ai traduit par « culpabilité ».
Je vous dis ma façon de sentir les choses, vous avez la vôtre.
Le regard de l’autre me paraît toujours instructif.
Passer du regard de soi au regard de l’autre, je n’appelle pas ça du « dialogue de sourds » et je respecte hautement votre amour du silence et de la méditation, je vous le redis.
Cordialement
Qui, à mon sens, « culpabilise » l’autre?
Vous, en dénigrant « le mental »?
Moi, en dénigrant « l’incohérence »?
Les deux, je le découvre – même sans « intention » de « culpabiliser » -.
Mon œil s’ouvre.
Merci.
Je préfère arrêter là la discussion François, puisque pour moi, il n’y a ni culpabilité, ni incohérence, ni désir de culpabiliser l’autre.
Je préfère arrêter là en prenant acte de nos vérités respectives qui sont différentes,
en les laissant reposer dans le silence du grand Tout, de sorte qu’elles perdent de leur importance émotionnelle egotique.
Je voudrais signaler un très bon article au sujet du « Transhumanisme » paru aujourd’hui dans le blog « Le temple des conscience » :
http://www.cielterrefc.fr/google-annonce-limmortalite-pour-la-fin-du-siecle/
Le « Transhumanisme » très rapidement devient la menace n°1 de l’extinction de l’espèce humaine telle qu’elle a été conçu originellement et nous devons rester très vigilants quant à sa prolifération exponentielle, partout, dans tous les secteurs de la vie humaine.
Marci Alain pour cette belle réflexion … qui nous invite aussi à dépasser notre mental.
Je publie aujourd’hui en miroir un article sur mon blog avec quelques commentaires concernant ta réflexion et j’invite les lecteurs à s’y reporter : http://www.cielterrefc.fr/lorsque-la-tao-menait-le-monde-et-les-cles-du-futurlaim/
Merci Denis,
bien sûr j’invite tout le monde à découvrir tes commentaires sur « le temple des consciences », qui est un blog en totale résonance avec celui-ci, et cela me semble très précieux.
Je serai curieux par ailleurs de connaître tes réactions, si tu as le courage de lire « Les clés du futur » de Jean Staune, car je sais que nous partageons une même admiration pour cet homme, qui dans ses livres précédents – en particulier « l’existence a-t-elle un sens – a fait beaucoup pour relier les progrès scientifiques avec une vision spirituelle. De même, je vois que le 13 avril prochain, il organise à Paris avec Bertrand Vergely, un débat pour dénoncer les dangers du « Transhumanisme » :
http://www.jeanstaune.fr/
Merci Alain pour ton aide à faire découvrir le Temple des Consciences effectivement en résonance avec ton blog.
J’éprouve, comme toi, beaucoup d’admiration pour la puissance intellectuelle de Jean Staune à présenter une vision globale de l’émergence d’une nouvelle vision non matérialiste dans les sciences. Je n’avais pas vu qu’il organisait un débat sur les dangers du transhumanisme et je vais sans doute relayer.
J’essaierai de consacrer ultérieurement du temps à son livre « les clés du futur ».
J’écrivais hier un petit article à paraître le 3 avril qui présentera une vidéo de Pierre Rabhi sur sa vision sacrée de la vie : l’Esprit à l’oeuvre dans la Nature vu à travers l’image du grain de blé. Quelle relation avec Jean Staune ? La Vie. La Vie dans le regard sur le grain de blé de Pierre Rabhi et la Vie que Jean Staune cherche et nous fait découvrir dans les visions et théories de certains scientifiques.
Mais quel lien avec le « Temple des Consciences » ? Le même : Montrer L’Esprit en action dans la matière, dans la nature : « dire que Cela est » et construire un lieu virtuel où vibre l’Esprit sous toutes ses formes sans jugement sur telle ou telle vibration… pourvu qu’elle soit sincère.
J’ai ouvert hier un nouvel onglet « Un monde à construire » destiné à mettre en avant des actions concrètes d’acteurs qui agissent pour faire surgir ce nouveau monde. Lutter contre le transhumanisme c’est montrer ses dérives mais il faut aussi en face construire des « centres de défense de la Vie » par exemple : Jean Staune dans les sciences, Pierre Rabhi dans une vision spirituelle de la Terre…
oui, Denis, nous sommes en phase, je souscris à tout ce que tu écris là ;
mais j’aimerais bien que tu lises ou plutôt que tu parcours « Les clés du futur », car dans ce livre, j’ai comme l’impression que Jean Staune veut en faire de trop et il sort de son domaine de compétence : la relation entre les sciences de pointe et une vision spirituelle ou transpersonnelle de l’évolution de la conscience humaine.
Ici, il émet des jugements et prend des options personnelles dans les domaines de l’économie, de la politique et de l’écologie, que je ne partage pas du tout ;
et dans ces domaines je me suis senti beaucoup plus proche de Pierre Rabhi et du mouvement de la « Décroissance », qui me semblent justement beaucoup plus imprégnés d’une certaine sagesse que ce que nous raconte Jean Staune, en passe à mon avis de devenir avec ce livre « le Jacques Attali de droite », ce qui est très dépréciatif de mon point de vue.
Oui j’essaierai de lire les clés du futur … mais pas tout de suite. A vrai dire je ne suis pas à priori très intéressé par ce livre et pas surpris de ton commentaire. En parcourant à nouveau Wikipédia à propos de Jean Staune je lis par exemple qu’il est chargé de cours dans le MBA du groupe HEC depuis 1995 et je pense qu’il reste très « productif » et « entreprise ». S’agissant de l’écologie je l’imagine plus « développement durable » que « décroissance » en effet.
Ce qui peut peut-être aussi me gêner c’est son approche spirituelle qu’il semble réserver aux religions : le site Sciences & Religion- très beau et qui a le mérite d’exister- est en outre limité au Bouddhisme, Christianisme, Islam et Judaïsme.
Bref, malgré l’immense travail qu’il produit pour montrer et faire sortir la science du matérialisme il me semble par ailleurs très orienté au plan économique – ce que tu sembles suggérer- et très orienté sur le plan spirituel car grand défenseur de la Foi chrétienne.
Tout celà n’est pas un péché … surtout en ces veilles de Pâques.
Mais bâtisseur du Temple des Consciences ouvert à toutes les spiritualités je regrette cette limitation… Je garde néanmoins pour lui une grande admiration pour le travail d’érudition qu’il a produit avec « notre existence a-t-elle un sens » et pour le travail qu’il fournit par ailleurs pour rapprocher la science de la spiritualité disons pour mettre en lumière les chercheurs qui font l’hypothèse de Dieu ce qui conduit évidemment à d’autres regards et donc d’autres découvertes que celles qui font l’hypothèse contraire.
Bonjour, en reparcourant ce blog si riche, parfois un peu « technique » pour moi qui ne suis pas si savante que ça, je me demande aussi pourquoi je ne trouve rien sur les 4 accords toltèques, qui ont tant fait couler d’encre et harmonisé divers courants de pensée, dépoussiérant le chamanisme et conciliant tout le monde.
Etre ouvert à toutes les spiritualités n’empêche pas de s’intéresser à certaines en particulier, en les intégrant à d’autres expériences.
If you’re reading this, you’re all set, parednr!