Métamorphose de l’éducation

Pour illustrer cette métamorphose nécessaire à notre époque, mon ami Armen Tarpinian vient de m’envoyer La lettre ouverte du collectif « Ecole changer de cap », où Edgar Morin apporte son précieux concours.

Armen Tarpinian est de ces  hommes alertes, appartenant à la génération d’Edgar Morin et de Stéphane Hessel, qui sont là justement pour nous alerter  des dangers actuels que court notre société, et nous faire réfléchir aux métamorphoses nécessaires. Il a publié, en 2009, Vivre s’apprend. Refonder l’humanisme. (Editions chroniques sociales)

Président de l’Association de la Psychologie de la Motivations, fondée par Paul Diel en 1964, il a dirigé de façon très ouverte et intégratrice la revue de même nom (1986-2008). qui « constitue un Patrimoine éditorial où il fait bon se ressourcer » écrit le philosophe Bruno Mattéi. Le numéro 36 de la Revue de Psychologie de la Motivation, « L’art d’aider. Psychothérapie, culture, société » en demeure une précieuse référence. La Revue PM s’est  beaucoup investie dans la défense de la profession de psychothérapeute, si gravement méconnue et bafouée par le législateur. Dans ce contexte il a codirigé, avec Serge Ginger et Edmond Marc, l’ouvrage Être psychothérapeute. Questions, pratiques, enjeux, Dunod, 2006.

Psychothérapeute et essayiste, Armen Tarpinian est aussi poète.

La poésie

Il partage avec moi ce sentiment que la poésie est un langage nécessaire au temps présent,  parce qu’elle participe à sa manière aux métamorphoses intérieures – idée  souvent défendue aussi par Edgar Morin tout au long de son oeuvre, et sur laquelle je reviendrai plus tard.
Je voudrais commencer par un poème d’Armen, tiré de son recueil « Le Chant et l’Ombre » reprenant l’ensemble de son oeuvre poétique éditée récemment aux éditions « La Part Commune ».   Il est extrait d’un chapitre qui s’appelle « Chemins de Job » et ce poème me semble être une belle métaphore, pour exprimer ce moment de l’abîme à traverser courageusement pour atteindre la métamorphose et retrouver « la joie tranquille du lézard ».

Si le soleil n’est qu’incendie
Et la vie vertige et folie,

Si le ciel n’a que la foudre
Pour nous conduire à raison,

Et l’esprit que mensonges à moudre
Pour édifier les idées, les maisons,

Si le sommeil n’est que l’oubli
Et rêver un réseau d’erreurs,

Si aimer n’est qu’un parti pris
Pour nous évader de nos peurs,

Si vivre est le fruit du hasard
Et le hasard le fruit du rien,

Ah ! dites-moi pourquoi cela plutôt que rien ?
Et d’où viendrait la joie tranquille du lézard ?

Ecole changer de cap : les dix transformations nécessaires et possibles

Armen Tarpinian est le coordinateur d’un groupe de chercheurs-novateurs-acteurs, dont les échanges ont abouti à l’ouvrage Ecole : changer de cap : contributions à une éducation humanisante, que relaie aujourd’hui le Site www.ecolechangerdecap.net

Venus d’horizons divers, ces chercheurs, enseignants, psychologues, sociologues, philosophes et, pour la plupart formateurs, réfléchissent à l’école et sa crise actuelle, dont l’actualité n’arrête pas de souligner les signes inquiétants, avec son lot quotidien de violences, d’échecs et d’exclusions, tandis que les psychothérapeutes que nous sommes, sont confrontés toujours plus  aux maux psychologiques graves des enseignants, engendrés par les situations impossibles auxquelles ils sont confrontés.  Si bien que ce système scolaire  – fleuron de la République – dont nous étions si fiers, est devenu un mauvais élève, avec un très médiocre classement, dans l’enquête internationale PISA sur le fonctionnement de l’enseignement dans un grand nombre de pays.

Ce qui me semble important dans ce texte, c’est qu’il allie le pragmatisme et la profondeur de l’analyse. C’est d’ailleurs le sens de ce mot « transformation », qui tranche avec une « énième » proposition de réformes, ou « réformettes »  ne mettant jamais en cause l’esprit d’un système scolaire, devenu archaïque ;  il s’agit bien d’une métamorphose en 10 transformations.
Bien que toutes soient essentielles, j’en choisirai trois qui me parlent particulièrement :
« officialiser le travail en équipe », pour intégrer enfin officiellement les pratiques pédagogiques de coopération et d’entraide, qui ont déjà été expérimentées localement, mais sans jamais de reconnaissance. Or nous avons besoin  de manière urgente d’inculquer à la jeunesse cet esprit d’entraide, face aux absurdités d’une compétition tout azimut qui met en péril le « vivre ensemble » d’une société.
« transformer les modes d’évaluation » : là encore, il faut arrêter avec ce système archaïque de notation et d’examens couperets, où les uns sont les gagnants et les autres les perdants, en sachant que les perdants vont grossir les rangs de tous les exclus, de tous les frustrés d’un système injuste, fondé sur la reproduction des inégalités sociales.
« éduquer au sens de la complexité et à l’esprit de la science ». Je sens dans cette transformation la marque d’Edgar Morin, qui n’arrête pas depuis si longtemps d’en appeler à l’interdisciplinarité dans l’éducation, afin d’ouvrir les esprits à la complexité de ce monde, afin de former des citoyens capables de comprendre et d’agir par rapport aux défis actuels de notre planète – défi où il faut bien sûr inscrire en premier, comme le souligne le texte, l’écologie qui est elle-même une science complexe et intégrant de nombreuses disciplines.

Je souhaite que ce texte poursuive son chemin et qu’il aille loin, pour transformer les esprits, jusqu’à finir par inspirer – je l’espère – les pouvoirs en place, qui doivent en avoir assez de jouer les « pompiers de service » pour éteindre les incendies quotidiens d’un système à l’agonie.

Imprimez le, partagez le, transférer le sur internet, et qu’il se répande comme une trainée de poudre comme l’annonce d’une métamorphose possible.

Le texte en entier sur fichier pdf

Le site internet d’ « Ecole changer de cap »

J’ai envie de terminer par cette citation de William Butler Yeats : « L’éducation ce n’est pas remplir un seau, mais allumer une flamme« 

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2 réponses à “Métamorphose de l’éducation”

  1. Catherine B dit :

    « L’éducation ce n’est pas remplir un seau, mais allumer une flamme« magnifique cette citation, une flamme, un souffle, une vibration, de la vie quoi, du qualitatif enfin au détriment du quantitatif qui asphyxie
    toute velléité d’aller de l’avant. J’étais une mauvaise élève en classe comme on dit, je me suis ennuyée mortellement à l’école car il y manquait ce souffle qui m’aurait fait traverser les montagnes je crois si je l’avais senti!

  2. fab dit :

    test de message