Il y a des livres qui interpellent,
celui-ci en fait partie.
Je suis content de vous partager cette découverte
et ces quelques réflexions qui me sont venues à la suite de sa lecture,
Le tout est suivi d’une histoire drôle de Mulla Nasruddin
dans la continuité de l’esprit de ce livre.
« On est foutu, on pense trop !»
Comment se libérer de Pensouillard le hamster
du Docteur Serge Marquis aux éditions de La Martinière
Voilà un livre agréable à lire ; il nous sort de cette pléthore éditoriale autour de la méditation de la pleine conscience, souvent un peu ennuyeuse, car ayant tendance à se prendre au sérieux. Mais ce livre – une fois n’est pas coutume – est drôle. Rien que le titre fait déjà toute la différence, il nous interpelle de son style familier, un brin « rigolard », « à la bonne franquette », comme savent si bien le faire nos cousins québécois, dont fait partie l’auteur.
Pourtant le sujet est très important, il est au cœur de tout le processus méditatif, il a déjà été décrit mille fois, depuis que la méditation existe :
comment arrêter notre « mental- émotionnel », centré sur le petit moi, dans sa frénétique posture de survie ? Il fait sans cesse « un raffut de tous les diables », en brouillant obstinément tout accès à la dimension supérieure de notre Conscience.
La démonstration est remplie d’exemples très drôles, empruntés à notre vie de tous les jours, avec en exergue cette métaphore amusante, revenant tout au long du livre, comme un leitmotiv plaisant:
«Vous avez un hamster du nom de Pensouillard dans la tête ! Et ce petit rongeur invisible est capable en une fraction de seconde, de capter toute votre attention et de se mettre à courir dans sa cage, à vous en faire perdre la boule. »
Alors que faire ? Le Dr Marquis nous propose un certain nombre de conseils basiques, qu’il a l’intelligence de résumer dans la notion de « décroissance personnelle » :
« La décroissance personnelle est la fraction de seconde au cours de laquelle vous prenez conscience que votre esprit est entièrement habité par des mots et des images contaminés par l’ego. C’est l’instant où l’attention surprend Pensouillard, alors qu’il monte dans sa roue (…) c’est la seconde la plus importante de toute votre vie et également la plus difficile à conquérir. Grâce à cet instant de conscience vous cesserez d’être l’esclave de Pensouillard.».
Pour aider à cette « gymnastique » de la décroissance personnelle, il faut laisser sa conscience, son attention, se tourner vers sa respiration, qui devient alors de plus en plus profonde, de plus en plus calme, en gagnant la région abdominale ; on peut aussi en profiter pour observer les sensations de son corps, et dans cet état intérieur pacifié, tourné vers le corps, il devient facile d’observer et d’accueillir l’agitation de « Pensouillard le hamster », qui, du coup, se sentant ridicule, arrête sa roue pour sauter au dehors et se perdre dans l’infinitude de la conscience.
La place est libre, l’activité « mentale -conscience » a remplacé l’activité « mental-ego », pour occuper désormais notre espace intérieur. Quant à la situation délicate qui avait mis « Pensouillard en transe », elle est désormais tenue à distance pour devenir même, une source d’inspiration créative.
Entre temps, grâce à ce petit livre, non seulement Pensouillard a été démasqué, nommé et interpelé dans de nombreuses situations de notre vie quotidienne – ce qui est une étape nécessaire et primordiale de désidentification -, mais la méditation est aussi descendue de son piédestal pour devenir un moyen amusant, pour calmer le copain Pensouillard.
Par ailleurs, le Dr Marquis a bien raison de revenir sans cesse sur notre époque où « nous vivons dans un monde malade du petit moi ». J‘ajouterai que ce n’est pas un hasard si le mot le plus sacré de la religion économique actuelle, s’appelle la « croissance », c’est à dire en fait, encore un sale tour de notre Pensouillard déchaîné, qui a contaminé la plupart des esprits de l’époque.
Arriverons-nous de manière significative, sur un plan collectif, à arrêter cet animal égaré dans sa course folle,
afin que la décroissance intérieure permette une décroissance extérieure d’ordre matériel, tellement nécessaire si nous voulons éviter le « crash » environnemental (1) ?
Ce livre est un succès : dans « Psychologies magazine » il est classé premier dans la rubrique « développement personnel » – ce qui est une grosse « bévue », puisqu’il s’agit au contraire de prôner la décroissance personnelle…
Mais pour laisser place aussi à la critique, je dirais que le livre a les défauts de son succès : il a tendance parfois à s’enfermer dans des anecdotes redondantes à la « pensouillarde », qui ne permettent pas d’aller plus loin, pour approfondir le processus méditatif.
Pour remédier à cela, je conseillerai en complément de lecture, à emporter dans sa valise de vacances – il est léger -, le petit livre d’Erik Sablé « Les 7 clés de la méditation »(2), c’est un tableau sérieux et exhaustif, tout en restant simple, de la méditation.
Une histoire de Mulla Nasruddin
Mulla Nasruddin est un expert pour nous montrer le fonctionnement stupide du mental humain,
en d’autres termes, pour démasquer « Pensouillard », en le poussant jusqu’à l’absurde, pour nous faire rire,
rire de lui-même, mais surtout au passage, rire de nous-mêmes.
En ce sens, le Mulla est un maître, un maître comme on les aime en Orient,
– en l’occurrence ici au Moyen Orient, puisque Nasruddin est considéré comme un maître soufi, ayant peut-être existé au 13e siècle en Turquie.
Ces maîtres ont un côté un peu fou, ou en tout cas irrespectueux, iconoclaste, imprévisible, tournant en dérision l’être humain,
utilisant le rire et l’humour comme un moyen privilégié d’enseignement ;
– en Occident on pourrait les rapprocher de la tradition du bouffon, le fou du roi.
Dans le même esprit il y a le maître indien Osho qui aimait particulièrement les histoires de Nasruddin,
et le livre de notre canadien, le Dr Marquis, escorté de son Pensouillard le hamster.
Cette histoire est tirée du livre « Les aventures de l’incomparable Nasr Eddin Hodja,
Histoires drôles et sages du célèbre maître soufi »,
recueillies et présentées par Jean-Louis Maunoury
aux éditions de poche « J’ai Lu ».
Une nuit, Nasruddin se décide à aller voler quelques légumes dans le jardin de son voisin. Ce n’est pas la première fois et celui-ci, arrivant à l’improviste, surprend le Hodja en flagrant délit.
– La honte sur toi, Nasruddin, ! Cette fois-ci, tu ne pourras pas prétendre que tu ne pénètre pas de nuit chez moi !
– Tu ne vois pas le vent qu’il fait ? Répond Nasruddin. C’est à cause de lui que je suis dans ton jardin : il m’a emporté, bien malgré moi, et m’a jeté ici.
– Mais pourtant tu déterrais bien un poireau, et à deux mains encore, quand je t’ai surpris, non ?
– O mon oncle, du calme ! Je me tiens à ce que je peux pour ne pas m’envoler.
– Mes ces légumes là dans ta musette, comment y sont-ils venus ?
– c’est justement la question à laquelle je réfléchissais au moment où tu es arrivé. Laisse-moi un peu le temps de trouver.
(1) pour la décroissance extérieure, lire le mensuel « la Décroissance, le journal de la joie de vivre », en vente dans tous les bons kiosques
(2) aux éditions Almasta septembre 2013
Tags : décroissance, humour, meditation, pleine-conscience, sagesse
Qu’est-ce que c’est intelligent, l’humour pour résumer des techniques un peu trop sérieuses…
On s’y perd tellement, dans le développement personnel.
Alors tout résumer en riant, quelle gageure !
Ca donne envie d’acheter le live et de le dévorer. Ah mais non, on serait encore pris dans la roue de Pansouillard ! Ne pas faire de boulimie de lectures non plus…
Je regardais mes hirondelles ce matin, qui chantaient pour célébrer l’aube. Voilà la clé.
Ne pas se prendre au sérieux et bien vivre chaque seconde.
Elles étaient dans leurs chants de l’aurore, pas ailleurs, pas pansouillardes pour deux sous.
C’est un luxe qu’on ne se permet guère dans la nature sauvage d’ailleurs. On est concentrés, en dharana… et le samadhi, c’est la chanson de soleil levant !
amitiés d’annie
PERMETTEZ-MOI d’en rajouter un peu : pansouillard, avec un a : c’est pour dire qu’on se remplit
aussi la panse de trop de nos jours, toujours plus toujours plus en tout en tout en tout ; on frise le délire. Personnes obèses, boissons, excès de tout… Où est l’hygiène de vie et de pensée dans le monde actuel ? Ca réduirait le coût de la sécu d’apprendre des régles élémentaires d’existence : nourriture sobre, pensées adoucies, calme, harmonie avec la nature, respect de toutes vies, etc… Il faudrait apprendre à boycotter un peu la nourriture physique, mentale, informatique, couper les portables, etc, réduire et aller voir les hirondelles !!!
Amitiés à tous
Merci Annie, c’est parfait, c’est exactement ça, il n’y a rajouter, sauf la question qui fait mal : mais pourquoi l’être humain se comporte si mal dans l’obésité mortifère de lui-même ?
Mon hypothèse : par absence de Conscience,
Pe(a)nsouillard le domine dans l’inconscience presque totale ; en ce sens on ne peut même pas l’accabler, cela fait partie du tragique de l’existence humaine : à coup de souffrances répétées provoquées par son inconscience, peut-être, peu à peu, lentement, l’être humain va accoucher difficilement de la Conscience…
Le Dr Marquis a l’intelligence de transformer cela en un jeu, avec humour,
oui il nous reste encore l’humour.
Si j’ai bien compris votre hamster apprivoisé vous dit: « mets moi-souvent à la porte, mais garde-moi pour que je répéte qu’il faut souvent me mettre à la porte ».
J’ai apprivoisé le mien à ma façon.
merci François de ce message, il me permet de préciser certaines choses (de mon point de vue bien-sûr).
Il me semble que la métaphore du « hamster apprivoisé » pour parler du mental dans sa relation à la Conscience, est intéressante mais limitée. Oui, quand la Conscience est là, le mental apparait certes comme un animal apprivoisé, mais tout va dépendre comment se fait l’apprivoisement et comment se tisse la relation Conscience – mental.
La Conscience n’a absolument pas besoin d’employer la méthode autoritaire du « tais-toi !, pour mettre à la porte le hamster », sa seule présence rayonnante suffit pour le hamster arrête sa folle roue de sa cage, et soit s’immobilise, totalement silencieux, soit saute au dehors de sa cage.
Pour employer une autre métaphore, c’est un peu comme le Soleil quand il pointe à l’aube de la nuit : est-ce qu’il a besoin d’élever la voix pour chasser la nuit ? Non bien sûr, c’est un processus d’effacement naturel et de présence rayonnante qui occupe tout l’espace.
Certes le hamster peut revenir à l’improviste et surprendre la conscience inattentive, mais quand celle-ci s’en aperçoit elle préfère la stratégie de l’observation attentive et bienveillante. Le hamster ne peut pas y résister, il est obligé de s’effacer, c’est comme un processus naturel, non-violent.
La Conscience n’est pas un maître d’école à l’ancienne muni d’une règle pour mater le mental. Elle emploie toujours la méthode douce : sa seule Présence suffit, le plus souvent silencieuse.
D’autant plus, qu’Elle a besoin par la suite du hamster apprivoisé – là je vous rejoint – pour que celui-ci devienne un messager de sa Lumière, c’est ce que Dr marquis exprime très bien par le terme le « mental- conscience qui remplace peu à peu le « mental- ego ».
Oui…
C’est plus clair pour moi, Alain.
Il me reste une gêne dans ce que j’appellerais la philosophie de la méditation, c’est son côté à mes yeux trop systématique.
Pour cette « philosophie », si j’ai bien compris, le mal c’est le mental, et le remède, la méditation. Ce système me paraît rappeler d’autres systèmes idéologiques, par exemple
– le christianisme, où le mal c’est le péché originel, et le remède, la foi dans le sacrifice du Christ plus ou moins relayé par les « sacrements »,
– le cartésianisme, où le mal c’est la souffrance humaine dans un monde où la raison est bridée par l’Eglise, et le remède que la raison prenne sagement son essor,
– le marxisme où le mal c’est l’exploitation de la classe ouvrière , le bien son émancipation et le remède la conscience de classe,
– le freudisme, où le mal c’est l’inconscient habité par Eros et thanatos, et le remède la passage au conscient par le discours,
– l’idéal de Zamenhof, où le mal c’est la haine entre ethnies, et le bien l’effort pour retrouver l’unité humaine.
Je n’adhère pleinement à aucun de ces systèmes, qui tous ont leur intérêt.
Pour moi le mal, c’est le mal, le bien c’est le bien, et vous et moi nous nous retrouvons en recherchant la CONSCIENCE.
– mais… comment aider la conscience à progresser, comment aider le « mental ego » à devenir « mental conscience »? La « méditation » est-elle le seul remède? Vous même parliez des trois voies spirituelles orientales nommées SAT, CHIT et ANANDA. La méditation me semble renvoyer à la première… mais il y a les deux autres…
– enfin , même si l’expérience humaine est souvent décevante et le « bien » rare, je n’aime pas la présentation globale et à première vue systématique d’un « mental » mauvais et « frénétique » présenté sous les traits d’un animal qui fait « un raffut de tous les diables ».
Bien sûr c’est un aspect de la réalité bien envahissant dans notre monde, mais ça donne l’impression qu’en dehors des « méditants » de la bonne école, il n’y a que de frénétiques égoïstes. Je trouve ça blessant pour les gens calmes par nature ou éducation comme pour ceux qui ont développé leur « mental conscience », capables de débusquer en un clin d’œil la mauvaise foi d’un Naruddin faisant mauvais usage de son mental.
Il va de soi que ma critique ne concerne que les « tics » d’un discours sur la méditation à mes yeux trop systématique, et non l’effort pour se conscientiser.
Voilà François, je peux enfin vous répondre, bien qu’ayant l’esprit un peu ailleurs, vu que je suis parti quelques temps aux confins du monde – j’en parlerai plus tard sur ce blog.
Vous avez raison François, il ne faut pas faire de cette distinction mental / conscience une opposition conflictuelle, style pensée judéo-chrétienne bien / mal, dont je partage le même rejet que vous.
Pour moi, la distinction mental / conscience est plus pertinente dans la pensée évolutive et intégrative – style Ken Wilber avec les différents niveaux d’évolution de la conscience qui s’élèvent comme sur une échelle vers des espaces intérieurs toujours plus vastes, toujours plus subtils, toujours plus profonds.
Le mental n’est pas le mal, il est une capacité évolutive de l’être humain vers l’abstraction très pratique, avec en particulier le symbolisme abstrait du langage ou plutôt des langages. Le seul problème du mental, c’est qu’il est limité la plupart du temps à la survie de l’ego humain qu’il soit individuel ou collectif (les systèmes de croyances). Il y a donc chez beaucoup d’êtres humains – pas assez nombreux encore sans doute – l’envie ou la pulsion évolutive d’aller encore plus loin dans l’abstraction pour développer des niveaux de conscience tournés, au delà de l’ego, vers le Tout, qu’on l’appelle Dieu ou par tout autre mot (le Soi, l’Etre, le Vide, la pleine ou pure Conscience, etc…).
Une des caractéristique de cette conscience plus évoluée, est que les mots y sont plus rares, ils deviennent moins importants, il y a comme une qualité de silence intérieur, qui s’expérimente de manière intime sans tapage – ce qui fait dire au Dr Marquis avec humour, que le mental, à l’opposé, a tendance à faire beaucoup de bruit, à faire de grands discours souvent filandreux – voir toute l’histoire de la philosophie ou des croyances religieuses où l’on peut se perdre dans la guerre des concepts avec le mental au poste de commande, au service des gros ego boursouflés – rien de pire que les soi-disant maîtres, il faut vraiment se méfier, surtout quand ils font beaucoup de bruits.
Je suis d’accord avec vous aussi pour dire que la méditation n’est pas le seul chemin d’accès à cette expérience des niveaux de conscience supérieurs.
En fait, je place l’Amour bien au dessus, car une c’est la plus puissante manière d’incarner la conscience du Tout et la nécessité d’unir les opposés – ce qui me semble être le chemin évolutif essentiel de l’être humain.
Mais il y encore plein d’autres chemins : une certaine forme d’Art est aussi pour moi très puissante – hier soir je regardais une émission télé sur le chanteur reggae Bob Marley, et il m’est apparu évident que celui-ci grâce à son art a essayé de faire monter le niveau de conscience de ses contemporains rassemblés en foule auteour de lui (il en est d’ailleurs mort prématurément, tellement la tâche était trop lourde, ce qui est souvent le cas pour les vrais maîtres, ils ne font pas de vieux os sur cette terre).
Il y a aussi le chemin de la Connaissance représentée par les multiples écrits des maîtres, prophètes, instructeurs, etc, de toutes les religions et spiritualités. Là, on retrouve le mental qui va essayer de traduire par les mots et les concepts les expériences intérieures spirituelles. C’est un chemin très délicat, très dangereux, très ardu, car il y a le danger de faire confusion entre l’expérience religieuse intime et une doctrine, un système intellectuel, dont la première réaction va être de s’opposer à…, de se distinguer de…, de revendiquer la vérité contre, etc…
La Vérité au niveau spirituel, c’est la totalités de toutes les vérités, c’est à dire qu’elle est fondamentalement inexprimable, informelle, c’est un Mystère.
Je me retrouve bien dans tout ce que vous dites, Alain.
Le seul passage qui coince un peu pour moi, ce sont les mots « une opposition conflictuelle, style pensée judéo-chrétienne bien / mal, dont je partage le même rejet que vous. »
Là encore, je voudrais nuancer.
Ce que je rejette comme vous dans le judéo-christianisme, c’est la tradition « théocratique » par laquelle un pouvoir religieux et/ou politique vise à imposer à tous ses propres lois au nom du Dieu unique.
Ca commence avec Moïse, ca recommence avec le christianisme institutionnel qui contourne Jésus au bout de deux / trois siècles, ça recommence avec Mahomet, ça recommence avec les guerres de religion, avec le sacre des rois, et à notre époque avec la politique qui s’abrite derrière le caractère prétendument sacré se l’Etat démocratique.
Ainsi les pouvoirs tentent de donner par la loi une définition du bien et du mal qui, de fait, assure ce pouvoir, mais ce mauvais usage des notions de bien et de mal ne veut pas dire que l’opposition du bien et du mal soit mauvaise en elle-même.
Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : instinctivement nous préférons l’agrément au désagrément, le plaisir à la douleur, la joie à la tristesse, le bonheur au malheur, et cette polarisation guide la vie biologique et spirituelle.
En ce sens Comte-Sponville disait : « quand la vie n’est pas atroce, alors elle est merveilleuse ».
Voilà pour le premier niveau du bien et du mal: c’est « vachement bien » de se sentir « bien ».
Le deuxième niveau, c’est celui d’Epicure: distinguer dans nos actes ceux qui conduisent au bien-être et ceux qui conduisent à la douleur. Par exemple savoir distinguer les bons champignons et les mauvais. Est bon ce qui me fait du bien, mauvais ce qui me fait du mal. Et là, ce n’est pas toujours évident. Je peux tâtonner longtemps avant de savoir quels aliments, quels climats, quels médicaments, quels exercices me font du bien ou du mal.
Le troisième niveau, bien plus complexe encore, c’est le niveau politique : dans mes actions, quelles sont celles qui créent du bonheur pour la collectivité? quelles sont celles qui créent du malheur?
Comme les goûts et les situations de chacun sont différents, comme « qui se ressemble s’assemble », il va se créer des tribus, des nations, des groupes d’intérêt, des classe sociales, des religions etc. dont chacune va avoir tendance à rechercher son bien être égoïste aux détriments de « l’intérêt général ». Et c’est là où politique et religions influencés par le judéo-christianisme interviennent, en faisant adopter contre des maux particuliers une législation qui ne correspond pas à l’idéal universel, celui-ci du reste ne se découvrant que très progressivement par tâtonnement.
L’état actuel de ma réflexion, c’est donc que pour l’humanité actuelle, le ressenti bien / mal s’impose, mais avec le devoir de rester vigilant face à toute utilisation perverse de cette réalité psychologique, aussi bien chez soi que chez autrui.
oui, bien sûr, je vois, vous restez très attaché, François, à la pensée dualiste du bien et du mal.
Heureusement vous êtes suffisamment intelligent pour en voir toutes les utilisations perverses et destructrices, et quand vous dites « la vigilence s’impose », j’ai envie de renchérir « plus de conscience s’impose ».
De mon point de vue, il est attendu une évolution intégrative de la conscience à un niveau supérieur de l’état de conscience dualiste, qui a prévalu jusqu’ici pour engendrer catastrophes sur catastrophes.
Cet état de conscience qui inclut et transcende les états de conscience anciens pour une vision de la réalité plus subtile et plus profonde, se situera au niveau transpersonnel et non personnel ou egotique comme la conscience ancienne, dualiste donc conflictuelle.
Cela voudra dire que la dualité perdra de sa force au profit de l’unité dans la diversité des formes. Cela voudra dira dire surtout, beaucoup plus d’amour et un certain silence contemplatif proche de la conscience méditative. D’ailleurs les mots manquent pour décrire cet état et c’est bon signe.