« Solitudes » : une exposition de photographie

C’est une exposition de photographie que je présente actuellement, dans un salon de thé de mon quartier (Paris 13e),
exprimant une vision personnelle de la Bibliothèque François Mitterrand,
où c’est plutôt un sentiment de solitude qui émerge de cette architecture froide et carrée.

Mais la fonction de l’art est peut-être alors,
passée la dénonciation première,
une sorte d’apprivoisement, de transfiguration, d’alchimie de la réalité,
de façon à laisser la Beauté se glisser en toute chose,
dans l’intégration esthétique des contraires.

Comme d’habitude, j’aime relier photographie et poésie,
pour ce texte exposé en préambule de l’exposition,
qui évoque une histoire racontée par les photos,
et dans les haïkus sous-titrant chacune d’elle.

« Solitudes »

Ici,
le matin
à l’aube
dans le silence déposé par la nuit
quand il n’y a personne,
la lumière s’invite à lécher les murs de métal
pour des jeux étranges
dont nul ne pourra jamais déchiffrer les signes.

Ici,
c’est un désert abstrait
calculé numériquement,
c’est un désert glacé que l’on traverse tête baissée
en se pressant inquiet
pour ne pas être rattrapé par toutes les solitudes d’un monde,
dont on devine l’implacable loi
faisant peu à peu de l’être humain
un irréductible étranger à son environnement.

Ici, c’est un désert vertical
qui barre le ciel de ses tours métalliques,
et sur l’horizontalité d’un sol de bois glissant
sans arbre et sans herbe
la pression des tours pleines de livres
apparait comme une érection vaine
impuissante à s’unir au réel.

Alors, dans ce désert des solitudes urbaines
tu seras ombre parmi les ombres
séparées par les vitres et l’obscurité de la nuit,
reflet virtuel de toi-même
condamné à errer sans fin
dans l’opalescence artificielle
de tous ces écrans de pixels.

Quant aux livres encagés dans leurs tours,
peut-être faut-il leur laisser la grâce de rejoindre le ciel,
peut-être sont-ils capables de se fondre encore
dans le miroir du grand fleuve…

 

Haïkus (des 6 photos ci-dessus)

Photo 1
Le matin à l’aube
la lumière joue sur le miroir des murs :
reflet d’une bouteille.

Photo2
Visage de l’Ailleurs
avec de grandes oreilles,
l’oeil plus grand que la bouche…

Photo3
Les Esprits échangent des signes
sur le mur d’acier étincelant,
mais quel lecteur en est digne ?

Photo4
Homme d’affaire,
il esquisse un pas de danse
à l’unisson de la tour.

Photo5
Femme aux tennis
courant plus vite
que son ombre.

Photo6
Petite fille
unique fleur
sur le désert de bois.

 

 

 

Tags : , , , , , ,

Les commentaires sont fermés.