Solstice d’été à Carnac

Ciel boudeur

Jeudi 21 juin 2012, 6h 12,
au quadrilatère de Crucuno, non loin de Carnac :
le ciel reste obstinément gris, boudeur, chargé de nuages inquiétants.
Les gens sont venus en nombre contempler le lever du soleil
sur le quadrilatère sacré,
mais il fait froid,
ils sont désappointés.
Ont-ils mérités-ils le soleil,
en cette année 2012 qui réclame une métamorphose radicale de l’humain ?
Le soleil a-t-il encore une raison de briller, pour la fête  de ce solstice d’été,
quand c’est la cacophonie d’un monde qui n’en finit pas de s’enfoncer
dans l’obscurité de l’illusion matérielle et sa profusion d’objets,
illusion ne venant plus de la contemplation du ciel vers le haut,
mais de l’obsession egocentrique vers le bas de l’avidité et de la possession
des choses,
illusion incapable de s’occuper avec sagesse
de ce joyau qui nous a été confié :
Gaïa, planète Terre.

L’homme, un médiateur entre le ciel et la terre

Le ciel est un lieu qui est ordonné dans l’espace et le temps.
Le soleil se lève à un endroit et à un jour précis.
Il ne peut être en retard ni ailleurs. aucun accident ne peut intervenir.
Il est soumis à la pensée et à la volonté du créateur.
Sur terre au contraire, c’est le chaos.
La maladie et la mort viennent sans prévenir.

Des anciens contes du monde entier racontent une même histoire.
autrefois le ciel et la terre étaient amis.
Ils se rendaient régulièrement visite et tous les êtres profitaient de cette entente harmonieuse.
Puis, suite à une querelle, le ciel coupa la relation
et la terre se mit à périr.
Selon les légendes, soit elle fut plongée dans le noir, soit elle commença à se dessécher ou elle connut des cataclysmes de diverses sortes.
Les créatures vivant sur terre furent si malheureuses qu’elles durent se résoudre à régler le problème, à réunir de nouveau le ciel et la terre.
souvent un héros, quelquefois un humain ou un animal, accomplissant une quête ardue,
réussirent à ramener l’ordre en établissant de nouveau cette relation entre le ciel et la terre.
mais quelque part, le mal est fait, des tensions existent
et l’homme doit jouer son rôle de médiateur.

Nous retrouvons dans beaucoup de sociétés « premières » cette notion du devoir de l’homme
envers le ciel avec un ou plusieurs dieux, et à la clé,
la perspective d’un retour à la paix et à l’harmonie.
Ce principe sous-tend de nombreux rites et cérémonies liés à des calendriers sacrés.

Mais comment faire pour que cela arrive ?
La création d’un espace sacré, bâti selon une connaissance des lois du ciel,  serait-elle la réponse ?
l’homme peut-il construire un sanctuaire qui n’est pas soumis aux lois terrestres et à la souffrance associée ?

Howard Crowhurst  « Mégalithes, principes de la première architecture monumentale du monde » HCom Editions

Carnac

Carnac semble être une prodigieuse réponse à ce questionnement posé par Howard Crowhurst dans son passionnant livre sur les mégalithes.
Le quadrilatère de Curcuno est un rectangle de pierres levées
aux dimensions parfaites,
il n’est qu’une parcelle de cet espace sacré,
dont on comprend maintenant qu’il était un immense temple à ciel ouvert,
parfaitement cohérent et organisé selon l’observation attentive du ciel,
à une époque ( – 6000 à – 3000 ans), où la terre et les hommes
étaient encore en harmonie avec le cosmos,
grâce à une connaissance contemplative,
dont nous ne possédons plus que quelques bribes.

Carnac, immense temple à ciel ouvert, reflet du ciel et de son ordre parfait,
dont les files de pierres levées, alignées dans un axe dominant Est / Ouest
reflètent clairement la course cyclique du soleil,
de solstices en équinoxes.

Carnac, architecture monumentale, ponctuée  par des centres d’énergies,
tumulus, cromlechs,  dolmens, menhirs géants comme à Locmariaquer,
dont la construction ou le transport nous laissent
dans le questionnement et l’admiration,
centres d’énergie, où les hommes de l’époque devaient venir se ressourcer,
se régénérer, renaître à une dimension transcendante.

Carnac, géométrie sacrée ne devant rien au hasard,
mais parfaitement mesurée selon des proportions harmonieuse,
relevant de la science des nombres la plus sophistiquée,
dont Pythagore (via Sumer puis l’Egypte)  serait le lointain dépositaire.

Fête de la musique

Le soir, c’est la fête de la musique :
le village, comme n’importe quel village de la région,
est dévasté  par son immense supermarché de tôle et de carton-plâtre,
entouré d’un désert de bitume réservé au parking.
Ce sinistre lieu est devenu le temple mercantile de l’époque,
il enseigne l’obésité des corps par ses viandes, ses huiles, ses sucres,
ses frites frelatées  et ses « pinards » aux prix cassés,
dans l’abondance factice de ses caddies trop chargés.

Longtemps dans la nuit on entend les cris d’une beuverie triste,
une sorte de joie malsaine
dont témoignent les canettes de bière cassées,
éparpillées au matin sur les trottoirs mouillés de pluie et de pleurs.

Il faudra attendre deux jours
avant que le Seigneur Soleil ne veuille bien se montrer,
pour un lever somptueux, dans l’alignement parfait du « Grand Manio »,
– ce qui est  une preuve de la loi céleste « Mort et Renaissance »
et montre  qu’il ne faut jamais désespérer.

 

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